Kahn, la belle sortie

Une page du football mondial vient de se tourner. Samedi, le Gottlieb-Daimler Stadion a vécu une soirée unique, inoubliable. L'Allemagne a réussi à décrocher la troisième place de sa Coupe du monde. Mais l'important est peut-être ailleurs. Pour cette "petite finale", le stade de Stuttgart a pu assister au dernier match international de Luis Figo, Pedro Pauleta mais surtout d'Oliver Kahn. Le portier du Bayern Munich, icône de tout le peuple allemand, a décidé de tirer sa révérence. "C'était mon dernier match international. C'était une époque merveilleuse mais il faut savoir s'arrêter", a lancé Kahn à l'issue de la rencontre.

Alors que toute l'Allemagne se réjouit de l'éclosion de la nouvelle génération lors de ce Mondial, elle pleure également le départ d'un grand champion. Après avoir réussi ses adieux contre le Portugal avec certains arrêts de grande classe, "King Kahn" quitte la sélection avec les honneurs. Et les poches bien remplies. Depuis 1994, il collectionne les titres nationaux et européens (une Ligue des champions en 2001, une Coupe de l'UEFA en 1996, sept titres de champion d'Allemagne...). Pourtant sa carrière internationale restera mitigée.

Elu trois fois meilleur gardien du monde (1999, 2001, 2002) et meilleur portier d'Europe de 1999 à 2002, Oliver Kahn a été obligé de lutter pour gagner sa place dans le but allemand. Commencée en 1995 contre la Suisse (2-1), sa carrière en sélection restera marquée par ses duels avec les autres gardiens de la Nationalmannschaft. Dont il fut souvent le grand perdant. Remplaçant lors du Mondial 1994, il a dû ronger son frein à l'Euro 96, où il fut sacré sans jouer, derrière Andreas Köpke. La même histoire se répéta encore à la Coupe du monde 1998.

Quand son heure sonne, l'Allemagne n'a plus les mêmes talents. Titulaire à l'Euro 2000, il ne peut rien faire et voit sa formation se faire éliminer au premier tour. La consécration viendra deux ans plus tard. En 2002, "Kahn le Barbare" réalise une Coupe du monde impressionnante. Il reçoit le titre de meilleur joueur du Mondial mais garde toutefois un souvenir amer de cette compétition. La faute à une bévue en finale devant Ronaldo qui ouvre la voie du sacre aux Brésiliens (2-0). La suite de sa carrière internationale sera tout aussi laborieuse. Eliminé au premier tour de l'Euro 2004, Kahn ne fait plus l'unanimité par la suite. Sa cote décline au fur et à mesure.

Dans sa quête de renouveau, Jürgen Klinsmann, arrivé à la tête de la sélection en 2004, impose Lehmann dans le but allemand. Le sélectionneur allemand prive même le portier de Munich d'une place de titulaire pour son Mondial en Allemagne. Au cours de cette compétition, Kahn va pourtant réécrire sa légende. Son attitude irréprochable sur le banc allemand a montré un nouveau visage. Présent à tous les moments pour ses jeunes coéquipiers, il a cassé son image de bourru de service et d'individualiste.

En Allemagne, Oliver Kahn a assumé à la perfection son nouveau rôle de grand frère. Au cours du tournoi, il affirme ressentir "une forme de respect que l'on ne peut pas gagner avec un titre" . A sa manière, il marque même les esprits. L'image de Kahn venant prendre Lehmann par les épaules pour lui glisser quelques mots avant les penalties contre l'Argentine restera à jamais graver dans les esprits allemands. Le "Titan", qui n'a jamais rien remporté en sélection, voulait continuer à l'issue de ce Mondial. Il est finalement revenu sur sa décision. Il a choisi de sortir par la grande porte avec une dernière sélection et avec le brassard de capitaine. Après onze ans de bons et loyaux services, il laissera un souvenir impérissable... Un gardien, craint et respecté, quitte la scène internationale.