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Liga - César Luis Menotti : "Quique Setién possède des idées auxquelles j’adhère"

Antoine Donnarieix

Mis à jour 19/01/2020 à 18:51 GMT+1

Sélectionneur champion du monde avec l’Argentine lors de la coupe du monde 1978, César Luis Menotti est également passé sur le banc de l’Atlético de Madrid lors de la saison 1987-1988. Une période où El Flaco fait la connaissance d’un certain Quique Setién, milieu de terrain au sein de l’effectif madrilène, devenu il y a quelques jours le nouvel entraineur du FC Barcelone.

Quique Setien

Crédit: Getty Images

Pourriez-vous nous décrire le joueur que vous avez coaché à l’Atlético de Madrid ?
En tant que footballeur, c’était un milieu de terrain très technique. On pouvait sentir qu’il aimait vraiment son sport, il était dans une quête d’apprentissage en permanence. Sa vision du jeu était déjà très importante et c’est pour cela qu’il était parvenu à devenir international espagnol durant son passage à l’Atlético. C’était aussi un excellent coéquipier, un compétiteur très exigeant envers lui-même. On ne pouvait pas parler d’un taulier car des joueurs plus capés que lui comme Arteche ou Goikoetxea avaient plus d’impact dans le vestiaire. Mais je le mettais en titulaire régulièrement au sein de l’équipe, et il savait en profiter pour engranger un maximum d’expérience.
À l’époque, Quique Setién pratiquait déjà les échecs et son surnom d’El Maestro (Le Maître, en VF) n’était sans doute pas étranger à cela… Comment est-ce que vous l’utilisiez sur le terrain et quelle fonction lui donniez-vous ?
Ce que j’aimais surtout chez lui, c’était sa qualité de passe depuis le centre du terrain. Il faisait souvent le bon choix dans ce registre et cela se voyait au moment d’observer le match depuis l’extérieur. En fait, c’était un joueur agréable à voir jouer avec le ballon. Il avait déjà cette forme d’admiration pour Johan Cruyff mais à vrai dire, n’importe quel joueur des années 80 prenait Cruyff comme idole. Je n’ai pas souvenir d’en avoir discuté en profondeur avec lui, mais on sentait de la générosité dans son style de jeu. Il pouvait parler de football sans discontinuer.
Le voir entraîner, ça me surprend pas
Est-ce qu’à l’époque, vous aviez la sensation qu’il avait un potentiel pour être entraîneur de haut niveau ?
Le voir entraîner aujourd’hui, cela ne me surprend pas. La chose qui attire mon attention, c’est qu’il va devoir évoluer avec l’exigence d’un très grand club désormais. Au Barça, il faut gagner mais également bien jouer. C’est maintenant à lui de prouver qu’il est capable de prendre en compte tous ces paramètres. Je ressens que nous avons des points communs, comme l’idée d’être toujours le protagoniste majeur de la partie. Avoir le ballon et savoir en faire quelque chose de productif, c’est une chose à laquelle j’ai consacré beaucoup de temps. Le jeu plaisant esthétiquement doit apparaître afin d’obtenir le résultat escompté.
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Quique Setién

Crédit: Eurosport

Vous avez également entraîné le FC Barcelone un peu avant, durant la saison 1983-1984. Quels conseils pourriez-vous donner à Quique Setién afin de réussir son expérience au club ?
Je crois que Quique Setién connaît bien l’histoire du FC Barcelone et ce que devenir entraîneur d’un tel club implique. À titre personnel, je dirais que j’ai pris part à la transformation d’un Barça animé par le concept du pressing haut pour contraindre l’adversaire à rendre le ballon et développer une phase de possession créative par la suite. J’ai notamment eu la possibilité de faire évoluer Maradona en numéro neuf avec Carrasco et Marcos (Alonso, père de l’actuel joueur de Chelsea, N.D.L.R) en ailiers… Par la suite, je crois que Cruyff, Rijkaard, Guardiola et Luis Enrique sont parvenus à perpétuer ce processus. Le beau jeu, c’est se sentir responsable et protagoniste du spectacle. C’est comme cela que doit évoluer le Barça, au-delà du prisme du résultat. Gagner te permet d’obtenir du temps supplémentaire mais à Barcelone, la finalité doit se trouver dans le beau jeu.
Vous aviez notamment Maradona dans votre effectif. Aujourd’hui, Leo Messi est considéré par beaucoup comme le meilleur joueur de la planète. Quelle attitude pensez-vous que Setién doit avoir par rapport à Messi ?
J’avais Maradona, mais également Schuster, Perico Alonso, Víctor Muñoz, Carrasco, Marcos, Quini, Alexanko… Nous avons remporté plusieurs titres car notre équipe était vraiment très forte. D’abord, je pense que Quique Setién doit se dire qu’il a beaucoup de chance d’entraîner Messi (rires) ! Ce ne doit pas devenir une règle, mais au moins tu sais qu’un joueur est capable de te faire gagner le match à lui seul. À ce niveau-là, je crois que tout l’effectif possède un niveau exceptionnel. Il faut savoir gérer le groupe de façon globale pour parvenir à associer l’expérience à la jeunesse. Maradona comme Messi sont deux joueurs extrêmement tournés vers les autres, ils savent que le football se gagne en équipe. Des joueurs comme Busquets ou Piqué sont aussi essentiels pour créer un lien de confiance avec le public. Mais en vérité, je crois qu’il est beaucoup plus simple de diriger le Barça qu’une équipe située à vingt points du leader.
Si tu travailles pendant vingt ans mais que tu es un âne, tu vas rester un âne
Même sans expérience dans un grand club, vous voyez Quique Setién capable de réussir au Barça ?
L’expérience, on l’acquiert grâce à la connaissance à travers le temps. Laissons-lui le temps de donner ses premières consignes, d’effectuer ses premières rencontres et nous verrons bien où cela va mener le Barça. Si tu travailles pendant vingt ans mais que tu es un âne, tu vas rester un âne. Si tu travailles pendant vingt ans mais que tu es intelligent, tu vas devenir très intelligent. Quique Setién connaît l’exigence du football professionnel, sa conscience est totale à ce niveau-là.
La Liga est désormais devenue très stéréotypée avec beaucoup d’équipe évoluant en 4-4-2, le spectacle est moins présent que sous l’ère Guardiola… En tant que créateur d'un courant de pensée du football dans les années 70 et 80, pensez-vous que Quique Setién soit capable d’influencer les années 2020 ?
Personnellement, j’ai l’impression que le Real Madrid et le FC Barcelone gardent toujours cet aspect d’équipe tournée vers le beau jeu. Cette année, je constate également que la Real Sociedad suit cette ligne de conduite. Il est difficile d’imaginer de quoi sera fait le futur, mais de ce que j’ai pu voir lorsqu’il entraînait le Betis Séville, Quique Setién possède une intention claire et des idées auxquelles j’adhère complètement. Maintenant, nous allons voir cela sur "la pelouse verte", comme le disait Di Stéfano…
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Quique Setien

Crédit: Getty Images

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