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Yacine Adli, pépite atypique et première victoire estivale du PSG

Ilyes Ramdani

Mis à jour 03/07/2018 à 09:50 GMT+2

LIGUE 1 - Yacine Adli a signé ce lundi son premier contrat professionnel en faveur du Paris Saint-Germain. Un temps annoncé à Arsenal, l’international tricolore U18 a donc choisi de rester et de s’imposer dans son club formateur. Une bonne nouvelle pour le PSG, qui conserve un des plus grands espoirs du football français. Et un profil atypique, sur le terrain et en dehors. Portrait.

Yacine Adli

Crédit: Imago

Sur le bureau d’Antero Henrique, son dossier devait être en bonne place, peut-être entre ceux de Gianluigi Buffon et Ngolo Kanté. Son nom a beau être inconnu du grand public, Yacine Adli constituait une des priorités estivales du Paris Saint-Germain. En signant son premier contrat professionnel en faveur du club parisien ce lundi, le milieu de terrain de 17 ans a mis fin à une négociation longue de dix-huit mois. Un soulagement pour le PSG, au terme d’un feuilleton qui a envoyé Adli au FC Barcelone, au Bayern Munich ou encore, plus récemment, à Arsenal.
“C’est une très bonne nouvelle pour le Paris Saint-Germain, confirme François Rodrigues, qui l’a eu sous ses ordres avec l’équipe réserve du club cette saison. Yacine est un joueur rarissime, encore en devenir. Enfin, après moult départs, un garçon issu de la préformation et de la formation du club signe professionnel au PSG.” La concurrence était pourtant rude sur le dossier. Ces dernières semaines, par exemple, Arsenal avait sorti les grands moyens pour séduire Adli.
Même Unai Emery, tout juste arrivé sur le banc des Gunners, s’en est mêlé. Mais le Paris Saint-Germain a lui aussi dégainé l’artillerie lourde pour retenir sa pépite. De Nasser Al-Khelaïfi à Antero Henrique, en passant par Thomas Tuchel, qui a décroché son téléphone pour convaincre le joueur, tout l’état-major parisien a mouillé le maillot dans ce dossier. Une ardeur atypique pour un joueur pas encore majeur. A en croire ceux qui le connaissent le mieux, l’investissement vaut le coup.
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Maxwell, Antero Henrique et Nasser El-Khelaifi

Crédit: Getty Images

Le sosie de Rabiot, mais pas son clone sur le terrain

“Yacine a du talent, assure ainsi son sélectionneur en équipe de France U18, Lionel Rouxel. C’est un créateur, un joueur capable de faire des différences. Je me réjouis qu’il signe pro au PSG, c’est une bonne nouvelle pour lui et pour le club.” Sur les terrains du Camp des Loges, cela fait quelques saisons que Yacine Adli ne passe pas inaperçu. La faute, d’abord, à un physique atypique. Une dégaine longiligne, une tignasse bouclée sur la tête et une ressemblance frappante avec Adrien Rabiot.
Même allure, même poste, même club… Il n’en fallait pas plus pour que d’aucuns fassent d’Adli le “nouveau Rabiot”. François Rodrigues tempère : “Il a des similitudes techniques avec Adrien Rabiot. Mais Yacine est un peu plus porté vers l’avant.” Et le formateur parisien, en partance pour diriger le centre de formation du Havre, de préciser le profil : “C’est un milieu de terrain axial, dont la force principale est la qualité de passe. Il est capable de trouver des décalages de très grande qualité, rares à cet âge-là." Rouxel loue un “profil atypique”, “excellent dans les 30 ou 40 derniers mètres adverses”, “souvent précieux dans l’avant-dernière passe, la dernière passe voire le dernier geste.”
Au rang des qualités, on peut ajouter, pêle-mêle, sa qualité de centre et de frappe (ses statistiques le prouvent), ses facultés techniques dans les petits périmètres (“Il me fait penser à Pogba, que j’ai eu au Havre, pour sa vitesse gestuelle et sa capacité à se sortir de petits espaces”, dixit Rodrigues), un volume de jeu important (petit, il était multiple tenant du titre de la Corrida de Villejuif, une course de 10 kilomètres), un jeu de tête maîtrisé et un jeu sans ballon de grande qualité (“il est très souvent disponible entre les lignes, ce qui lui permet d’être dangereux”, dit Rouxel).
A 17 ans, Adli présente un CV déjà bien fourni. Au PSG, il a remporté deux titres de champion de France U17 en deux participations. En équipe de France de jeunes, il comptabilise 33 sélections et 13 buts en trois saisons, ce qui en fait un pilier de sa génération. Il vient d’ailleurs d’être surclassé par Bernard Diomède au sein d’une liste élargie en vue de l’Euro U19, avec la génération du dessus. Sans oublier des récompenses individuelles, dont la dernière en date est le “Titi d’Or” reçu en mars dernier. Un titre qui récompense le meilleur espoir du centre de formation du PSG, gagné en leur temps par Kingsley Coman ou Alphonse Aréola (entre autres).
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Yacine Adli

Crédit: Getty Images

Une intelligence au-dessus de la moyenne

Ces succès, tout comme le feuilleton de son vrai-faux départ à Arsenal, Adli les a accueillis avec une relative sérénité. Pas d’effusion dans les médias, sur les réseaux sociaux ou ailleurs. “Yacine est quelqu’un de très calme, explique Lounes, son frère, de trois ans son aîné. Il sait ce qu’il veut et il est très déterminé.” Moulay Chebab, qui l’a entraîné pendant trois ans à Villejuif, ne dit pas autre chose : “C’est un garçon qui a une intelligence au-dessus de la moyenne.” Intelligent et mature : les deux qualificatifs reviennent dans la bouche de chacun de nos interlocuteurs.
Pour l’intelligence, il faut revenir aux origines. A Villejuif, dans le HLM de la famille Adli. Deux parents originaires du même village de Kabylie. Trois enfants, une soeur aînée et deux frères, avec Yacine en guise de petit dernier (“le chouchou”, dit son frère, “blond aux yeux clairs”). Et un goût prononcé pour l’éveil culturel. Chez les Adli, on apprend à lire à l’âge de quatre ans, motivés par Abdennour, le papa. Avec son frère, Yacine fait des échecs, du violon, touche au solfège et au piano, puis s’inscrit au judo…
“L’objectif, c’était de les éveiller, raconte le papa. Moi, j’ai appris à jouer de la guitare à l’oreille. J’aurais adoré que mon père m’inscrive au conservatoire. Alors, je me suis dit qu’avec le peu de moyens que j’avais, j’allais inscrire mes fils au conservatoire. Je voulais qu’ils aient l’envie d’apprendre.” Un objectif visiblement rempli. “Son cerveau, ce n’est pas le cerveau des autres”, dit son coach d’alors à l’US Villejuif, Moulay Chebab. Bilel, un de ses amis d’enfance, raconte : “Au collège, il avait 16 de moyenne générale, pas moins. Il avait des facilités, c’est quelqu’un qui réfléchit vite. Et qui aime être le meilleur. En maths, on s’amusait à comparer nos notes, parce qu’on était bons tous les deux."

A Villejuif, "tout le monde l’aime"

Intelligent et compétiteur. Deux qualités que Yacine met vite à profit dans ce qui le passionne le plus, le football. Moulay Chebab se souvient : “Il dormait au stade, j’avais l’impression de le voir tous les jours ! C’était un vrai passionné, acharné de travail. Il ne supportait pas l’idée de perdre.” Bilel résume : “Il vit football, il parle football, il mange football. Même aujourd’hui, quand il vient au quartier, il veut taper dans un ballon.” Son papa regorge d’anecdotes à ce sujet. “On ne pensait absolument pas à ce qu’il devienne professionnel. Le football, c’était son plaisir. Il mettait tout son argent de poche dans les vignettes Panini pour remplir ses albums !”
L’autre point, c’est la maturité. “Yacine est quelqu’un de très réfléchi, poursuit le pote de toujours, Bilel. Il est capable de prendre des décisions.” Lounes, le grand frère, va plus loin : “Il a un côté timide mais c’est un leader. Il a toujours eu cette facette-là, même avec des plus grands que lui.” Moulay Chebab résume : “Son cerveau, ce n’est pas celui des autres. C’était un bonhomme avant l’âge.” La faute, peut-être, à une épreuve familiale qu’il vit très jeune, le cancer de sa grande soeur. “Ca a soudé la famille, explique avec le recul son frère. On a traversé cette épreuve ensemble et on en est ressortis comme un noyau indissociable.”
La famille, les amis d’enfance, son club d’origine aussi : Yacine Adli a gardé un lien très fort avec ceux qui l’ont vu grandir. A Villejuif, “tout le monde l’aime”, résume Bilel, devenu éducateur à l’école de football de l’USV. “Pour mes joueurs, c’est un exemple. Il n’était pas forcément le meilleur joueur de sa génération plus petit, mais il l’est devenu à force de travail et d’humilité. Et aujourd’hui, dès qu’il peut, il vient, il passe du temps avec les petits, prend des photos, leur fait des cadeaux…" Son frère livre son analyse : “Il se sent obligé de revenir humblement. Il n’oublie pas qu’il est parti de là, qu’il n’avait rien. Et, même s’il a un jour, ça sera toujours rien comparé à ce qu’il a gagné, humainement, ici, au club, au quartier.”

Un noyau familial solide et le même agent que Dembélé

Pour l’épauler, le noyau familial s’est développé autour de la progression du petit dernier. Son papa s’apprête à quitter son emploi pour se consacrer à la carrière de son fils. Sa soeur suit des études en communication et marketing, son frère est diplômé en économie-gestion et s’apprête à passer sa licence d’agent… “Le but, c’est d’accompagner Yacine au très haut niveau, explique Lounes Adli. Quand on voit les grands champions, il y a toujours une famille soudée autour, de Zidane à Mbappe en passant par Neymar ou LeBron James.” Une présence familiale qui n’empêche pas de s’entourer de compétences extérieures : Yacine Adli a un agent, Moussa Sissoko, qu’il partage notamment avec Ousmane Dembélé et Layvin Kurzawa.
C’est avec cet entourage que Yacine Adli va affronter ces prochains mois une étape charnière de sa jeune carrière : l’intégration au groupe professionnel du PSG. Pas de quoi inquiéter ses proches. “Tout ce qui lui arrive, il l’a voulu et il a travaillé pour ça, rassure son père. Il saura y faire face.” De là à pointer le bout de son nez en Ligue 1 ? Son dernier formateur, François Rodrigues, y croit : “Quand Nkunku a intégré l’équipe première, Laurent Blanc lui a donné du temps de jeu dans un certain turn-over. Yacine est capable d’avoir le même type d’intégration. A lui de convaincre le coach. Tout ne va pas arriver mâché, il aura à aller chercher ce temps de jeu.”
Dans le PSG de Tuchel, Adli pourrait porter différentes casquettes. Il faut dire que le garçon a l’habitude de la polyvalence : défenseur central à ses débuts à Villejuif, milieu axial au PSG, il a également l’habitude de jouer ailier en équipe de France. Rodrigues résume : “Si on imagine un 4-2-3-1, il peut tout à fait jouer dans les 2 du milieu comme aux 3 postes offensifs, surtout dans un PSG où les couloirs sont occupés par les latéraux.” Rouxel précise : “Plus il est haut sur le terrain, plus il est intéressant.”
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Tuchel : "Les points essentiels pour gagner ? Structure, esprit d'équipe et travail quotidien"

"La force des grands joueurs"

L’ancien attaquant de Guingamp prévient toutefois son poulain : “Yacine peut se mettre au niveau de la Ligue 1 mais il doit travailler, notamment sur ses points faibles.” Et Rouxel d’évoquer “des étapes à franchir, en termes de constance par exemple : il doit être plus régulier, sur un match, sur plusieurs matchs et sur une saison entière.” Son entraîneur en club évoque un autre point, plus tactique : “Il a parfois tendance à s’oublier sur les transitions défensives.” Ce que partage Rouxel : “Si je l’ai mis sur le côté, c’est aussi pour qu’il se concentre sur son replacement défensif.”
En terme d’état d’esprit, Rodrigues pointe un autre écueil. “Sa confiance en lui peut parfois lui jouer des tours. Yacine sait qu’il peut faire la différence. Parfois, il a tellement envie d’aider l’équipe qu’il en fait trop, en forçant par exemple la passe décisive ou le but. Mais ce n’est pas pour se montrer. Il veut aider l’équipe à gagner.” Rouxel embraye : “Sa générosité le pousse à faire beaucoup, parfois trop. Il a besoin de confiance mais aussi, de temps en temps, d’être recadré.”
Rien de nature, toutefois, à inquiéter ses formateurs. “Il va grandir, progresser, se canaliser, assure Rodrigues. Ce qui compte, c’est que Yacine ne doute pas. Et c’est aussi la force des grands joueurs. Les joueurs de caractère, ce sont les joueurs qui sortent du commun. Et ce sont souvent eux qui réussissent.” Moulay Chebab ne s’en fait pas non plus pour son protégé : “Il part du principe que quand il veut quelque chose, il va le chercher. Il a beaucoup travaillé pour en arriver là. Il ne va pas s’arrêter maintenant.” Son frère, Lounes, conclut : “Il sait dans quel effectif il arrive et le travail qu’il aura à fournir. Il y est prêt.”
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