Mercato - Et le piège de Kylian Mbappé s'est refermé sur le PSG

La vie est un éternel recommencement. Le mercato du PSG aussi. Chaque été, la même révolution promise puis déçue. Chaque été, les plus grands noms pour un paquet de déceptions. Chaque été, l'espoir avant le désarroi de printemps. Et depuis 2021, pour ajouter un peu de piquant au tout : chaque été, un feuilleton Kylian Mbappé. Alors qu'il pensait être l'abri de pareille péripétie en 2023, la lettre du Français à sa direction, reçue à la surprise générale lundi, a tout relancé.

L'annonce est d'ampleur et désormais de notoriété publique : Kylian Mbappé ne souhaite pas activer l'option de prolongation qui figurait dans son contrat initial. Contrairement à ce que le PSG avait communiqué, contrairement à l'année qui figurait en flocage de son maillot lors de l'officialisation de sa prolongation l'an passé, le Français est lié au club parisien jusqu'en juin 2024. Et, visiblement, il n'a pas envie d'aller beaucoup plus loin, même pour une année de plus.

Que veut vraiment Mbappé ? Au fond, personne n'en sait rien, à part son cercle de proches le plus restreint. Le joueur n'a pris aucune décision forte quant à son avenir, il n'a pas formellement indiqué à sa direction sa volonté d'être vendu dès cet été, il s'était projeté publiquement au PSG l'an prochain et n'a fait que devancer administrativement et formellement une situation qui allait devenir effective au 31 juillet. Personne ne sait ce que désire Mbappé et c'est donc un poker menteur qui s'organise. Souci, c'est Paris qui en fait les frais.

Deux jours après l'ouverture du mercato, alors que l'identité du coach la saison prochaine est encore inconnue, alors que des mouvements ont déjà été bouclés (Asensio, Ugarte, Skriniar), mais que le gros du chantier est encore à construire, alors que Lionel Messi est parti et que Neymar est à vendre officieusement, Mbappé met Paris face à ses contradictions et ses promesses non-tenues à ses yeux.

Pas de Lewandowski, pas de Tchouaméni, pas de renforts appropriés et cette phrase, qui résonne plus en juin qu'en mars dernier, après l'élimination face au Bayern Munich : "Quand on regarde l'état des deux équipes : ils ont une grande équipe, un grand effectif, ils ont une équipe qui est bâtie pour gagner la Ligue des champions. Je l'ai dit en début de saison lors de la première conférence de presse de C1 qu'on allait faire notre maximum. Notre maximum, c'est ça..."

Cette lettre a-t-elle vocation à mettre la pression sur Paris en cet été charnière ? Possible. Mais Paris non plus n'en sait rien et se retrouve donc dans une position inconfortable : comment renforcer un projet si celui autour duquel il devait tourner n'est plus là ? Voilà donc comment le PSG et Nasser Al-Khelaifi se retrouvent piégés. Dépendants, encore une fois, d'un seul joueur qui a toutes les cartes en main.

La surprise et la colère du président qatari sont entendables et renforcent d'ailleurs l'idée d'un coup de pression médiatique. Mbappé et son clan ne négociaient-ils pas encore quelques semaines auparavant pour renforcer encore un peu plus leur collaboration ? Reste que, pour sauver les apparences, le président parisien n'a pas eu le choix : un ultimatum forcé par Mbappé. Soit il prolonge cet été, soit il est vendu au plus offrant.

Cet acte d'autorité, bienvenu sur le papier, n'a en réalité pas grand sens. Il intervient trop tard - ou alors trop tôt après avoir offert tout ce qu'il était possible d'offrir l'été dernier au Français pour le conserver à six mois du Mondial qatari. Trop tard parce que Paris a pris un virage radical l'été dernier pour que tout tourne autour de Mbappé.

S'il venait à être vendu, quel projet ? Une année zéro ? Sans Mbappé ? Possiblement sans Luis Campos, déjà affaibli par l'expérience Christophe Galtier ? Avec quel coach, sachant que la possibilité d'entraîner le Français reste un argument majeur pour un poste instable, harassant et politiquement miné ? Peut-être est-elle souhaitable, au fond, pour que Paris retrouve de la cohérence et un projet mieux taillé mais, en l'état, l'année zéro semble être une fausse option. Sans même évoquer les négociations interminables autour d'un dossier complexe impossible à boucler en l'espace de quelques semaines…

En réalité, Mbappé a pris le mercato du PSG en otage et laisse donc Paris face à la nature de son projet : donner à son joueur phare les conditions sportives requises pour espérer une nouvelle prolongation. Ou le vendre à contre-cœur pour une humiliation publique, chose que le Qatar a toujours veillé à éviter en conservant systématiquement ses meilleurs joueurs sous contrat.

Les images du 21 mai dernier, au Parc des Princes, avant le match contre Metz, ressemblent déjà à de la préhistoire. Ce jour-là, tout sourire, Al-Khelaifi ne se doutait pas qu'il était tombé dans un piège en acceptant cette année supplémentaire en option. Le piège s'est déjà refermé sur lui. Et, malgré les apparences, il ne semble pas près d'en sortir de sitôt…