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Theo, l'autre Hernandez qui a mis Maldini (et Milan) dans sa poche

Guillaume Maillard-Pacini

Mis à jour 22/12/2019 à 08:37 GMT+1

SERIE A - C'est une deuxième carrière qui a commencé pour Theo Hernandez. Après une expérience plus ou moins ratée au Real Madrid, le frère cadet de Lucas s'éclate du côté de l'AC Milan, où il a déjà inscrit quatre buts cette saison. Un pari gagné pour Paolo Maldini, qui a tout fait pour le recruter l'été dernier.

Theo Hernandez (AC Milan)

Crédit: Getty Images

En Italie, un joueur de football a plusieurs façons différentes de mesurer sa cote de popularité auprès de ses tifosi. Dans un pays où le ballon (rond) est roi, cette dernière reste toutefois sujette à de fortes variations et en proie à tous les excès. C'est la dure loi du Calcio.
Par exemple, si les sifflets pleuvent sur vous à chacune de vos sorties du terrain, ce n'est pas très bon signe. En cas d'indifférence générale, tout reste encore à peu près jouable. Des applaudissements ? Vous êtes sur la bonne voie. Et si la "curva" (virage en italien, nldr) commence à entonner un chant à votre gloire, vous venez de décrocher le jackpot. Comment oublier le fameux "Oh mamma mamma mamma..." des tifosi du Napoli pour Diego Maradona, ou encore le "Bati Bati Bati Batigol" de ceux de la Fiorentina pour Gabriel Batistuta ?
De toutes ces catégories, Theo Hernandez, lui, est entré tout droit dans la dernière. Le tout en presque trois mois chrono. Débarqué à l'AC Milan cet été, le natif de Marseille - qui ratera le match de dimanche face à l'Atalanta, suspendu - a déjà le droit à son chant personnalisé à chacun de ses buts : "Olé olé olé, Theo Theo", reprennent ainsi les tifosi milanais. Un détail qui en dit long sur ses premiers premiers pas en Lombardie, où il a retrouvé le sourire depuis l'été dernier.

Maldini, la rencontre qui change tout

Nous sommes le 23 juin 2019. Alors en vacances à Ibiza, Theo Hernandez, tout juste revenu au Real Madrid après son prêt à la Sociedad, a rendez-vous dans un petit bar du coin. Et pas avec n'importe qui. En face de lui se dresse Paolo Maldini, l'homme aux cinq Ligues des champions avec l'AC Milan.
Nouveau directeur technique du club lombard, l'ancien capitaine rossonero mène son premier mercato sans Leonardo, parti rejoindre entre-temps le PSG. Et l'un de ses objectifs prioritaires, c'est de recruter le latéral français, qu'il suit depuis maintenant depuis quelque temps. En décidant d'aller le rencontrer en personne, l'historique numéro 3 milanais, qui a construit (presque) toute sa carrière au poste de latéral gauche, veut lui témoigner tout son intérêt.
"Ma rencontre avec Paolo Maldini a tout fait basculer, expliquait récemment Theo Hernandez à L'Equipe. Il est venu me rencontrer à Ibiza, où j'étais en vacances. On a tout de suite accroché. Maldini, c'est un mythe, probablement le plus grand joueur à mon poste. Nos discussions m'ont montré qu'il me connaissait bien. Quand Paolo Maldini vous recrute, ça vous file quand même de la confiance." Peu après cette rencontre, l'AC Milan officialisera son arrivée pour environ 20 millions d'euros. Lors du premier match amical de son équipe, face à Novara, il marquera même l'unique but des siens. Le début de l'histoire ressemble à celui d'une idylle.

Une blessure qui freine son intégration

Mais peu de temps après, le premier accroc. Touché à la cheville face au Bayern Munich (23 juillet) pendant la tournée estivale des siens, Theo Hernandez est stoppé dans son élan. Un temps envisagée, une opération est finalement écartée. Mais pour revoir le Français à l'oeuvre, il faut attendre près de deux mois et le derby perdu face à l'Inter (0-2) à la mi-septembre.
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Theo Hernandez - Milan-Inter Serie A 2019-20

Crédit: Getty Images

Entré à un quart d'heure de la fin, le Français en profite pour montrer toutes ses qualités offensives. Seul le poteau l'empêche de réduire la marque après un raid solitaire. Depuis, il n'est plus sorti du onze titulaire. Ricardo Rodriguez, son concurrent aux caractéristiques diamétralement opposées, est expédié sur le banc par Marco Giampaolo. Après le licenciement de ce dernier, la donne reste la même. Stefano Pioli, le nouveau coach, a bien compris que le couloir gauche avait un nouveau patron.

"Le dernier latéral gauche aussi fort à Milan, c'est Serginho"

Si le club lombard reste enlisé dans le ventre mou du classement, Hernandez, lui, enchaîne les belles prestations. Dans le 4-3-3 de son nouvel entraîneur, il a la liberté d'attaquer autant qu'il le souhaite. Et pour couvrir ses grandes galopades vers l'avant, la défense milanaise passe généralement à trois derrière pour mieux couvrir la largeur. Physiquement, l'ancien Madrilène impressionne. Capable de multiplier les longues courses, la fatigue ne semble jamais le gagner. Quand il reçoit le ballon, son regard se porte immédiatement vers l'avant. Lui, ce qu'il aime, c'est l'attaque. Hernandez raffole des dribbles et ne recule jamais face à son adversaire direct.
Face à Bologne et Sassuolo, lors des deux dernières rencontres de l'AC Milan, il a reproduit par deux fois la même action. Ballon au pied, le Français remontait tout le terrain dans le temps additionnel, éliminant ses adversaires un à un avec une facilité déconcertante. Si l'épilogue fut à chaque fois le même (arrêt du gardien adverse), ses qualités athlétiques - après 90 minutes dans les jambes - laissaient sans voix.
"Je pense que c'est un grand joueur avec de très bonnes qualités physiques. Il a une très bonne course, de la force et très bon pied gauche", nous confie Luca Antonini, ancien latéral gauche de l'AC Milan (111 matches entre 2008 et 2013) et formé au sein du club lombard. "Mentalement, il a une grande approche de chaque match", ajoute-t-il.
Auteur de quatre buts depuis le début de la saison, Theo Hernandez a déjà établi un nouveau record : jamais un latéral n'avait marqué autant lors de sa première saison milanaise. Il aurait même pu en inscrire un cinquième - et troisième consécutif après Parme et Bologne - si le VAR ne l'avait pas annulé dimanche dernier face à Sassuolo (0-0). Autant dire qu'il faut remonter à loin pour retrouver un latéral gauche de cette trempe. Et pourtant, on parle d'un club qui a une grande tradition de latéraux gauches (Tassotti, Maldini, Serginho).
Depuis presque une décennie, il faut dire que Milan a accumulé les échecs à ce poste. Taye Taiwo, Djamel Mesbah, Kevin Constant... La liste est longue comme le bras. Avec Theo Hernandez, c'est une autre histoire. "La dernière fois que le club a eu un latéral aussi fort, c'était moi (rires), plaisante Antonini. Mais plus sérieusement, je pense qu'il faut remonter au temps de Serginho."

Défensivement, il y a du boulot

Si les qualités offensives du frère cadet de Lucas Hernandez sont indéniables, il doit désormais travailler sur celles défensives. Face à Bologne (2-3), par exemple, il avait causé un penalty plutôt bête. Dans l'alignement et le positionnement, des progrès sont également attendus. L'intéressé, qui en est bien conscient, y travaille d'arrache-pied à Milanello la semaine.
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Théo Hernandez et l'AC Milan

Crédit: Getty Images

"Défensivement, il doit encore beaucoup progresser, mais l'Italie est le pays idéal pour le faire. S'il veut devenir un joueur complet, il doit rester encore en Serie A, même si cela ne s'annonce pas simple...", explique Antonini, visiblement craintif en vue de prochains mercatos. L'été dernier, plusieurs clubs s'étaient en effet déjà positionnés pour recruter. "Naples était chaud (...) J'ai aussi failli aller au Bayer Leverkusen. Il y a eu également de beaux contacts en Angleterre. Des grands clubs mais avec moins de garanties de jouer", révélait Hernandez à L'Equipe début décembre.
L'AC Milan, qui lui a fait signer un contrat de cinq ans, a toutefois de quoi voir venir. Et de son côté, le joueur semble (enfin) avoir trouvé de la stabilité après plusieurs prêts successifs à Alavés ou encore la Real Sociedad. "Pour moi, il peut clairement s'inscrire dans la tradition des grand latéraux milanais", assure d'ailleurs Luca Antonini.

Et les Bleus dans tout ça ?

Heureux et épanoui en club, Theo Hernandez donne littéralement un deuxième souffle à sa carrière. Son nouvel état d'esprit est d'ailleurs très apprécié au sein du club lombard. Quant à ses erreurs de jeunesse, comme son refus d'honorer sa première convocation en Espoirs en juin 2017, elles ne sont plus qu'un lointain souvenir. Depuis, le gamin est devenu adulte. Mais cette tâche reste toutefois difficile à enlever de son CV.
Au fond de lui, le Milanais espère toujours porter, un jour, le maillot de l'équipe de France. L'Espagne l'a également courtisé ? C'est vrai, mais son choix est fait depuis longtemps. Son envie, c'est de jouer avec les Bleus. Le paradoxe, c'est que le couloir gauche est pour le moment occupé par... son frère. Et derrière Lucas Hernandez, Didier Deschamps a plusieurs seconds couteaux : Lucas Digne, Benjamin Mendy ou encore Ferland Mendy.
Le sélectionneur, qui a rempilé jusqu'en 2022 et dont la logique de groupe est notoire, n'a également pas oublié l'épisode des Espoirs. Theo Hernandez part donc de loin. Mais il a le mérite d'être sur le bon chemin.
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Didier Deschamps

Crédit: Getty Images

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