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ATP Los Cabos - Du podium à la sortie du Top 10 : Stefanos Tsitsipas, chronique d'un lent déclassement

Maxime Battistella

Publié 21/02/2024 à 09:29 GMT+1

Quasiment cinq ans jour pour jour après y être entré, Stefanos Tsitsipas a quitté le Top 10 cette semaine. Engagé à Los Cabos, tournoi à suivre sur Eurosport, le Grec, qui a fait figure d'héritier naturel du "Big 3" pendant une certaine période, est rentré dans le rang. A tel point que cette chute symbolique au classement apparaît logique. Mais comment l'expliquer et surtout peut-il l'enrayer ?

Tsitsipas, gainage et dextérité pour un point "dingue"

C'était il y a à peine plus d'un an. Le 29 janvier 2023, Stefanos Tsitsipas jouait sa deuxième finale en Grand Chelem, à l’Open d’Australie. Et comme à Roland-Garros en 2021, il tombait sur un os nommé Novak Djokovic qui le privait de son rêve. Contrairement à sa déception majeure sur la terre battue parisienne – il menait deux sets à rien avant de se faire renverser –, le Grec, nettement dominé, semblait avoir mieux encaissé le choc et affichait sa détermination à combler l'écart qui le séparait du monstre serbe. Il était alors numéro 3 mondial. Mais cela parait désormais si loin. Car cette semaine, il est sorti du Top 10, un cercle fermé qu'il n'avait pas quitté depuis qu'il l'avait intégré le 4 mars 2019, voici près de cinq années.
Ce déclassement symbolique, lui-même s'y était préparé. En témoignent ses propos après son élimination en 8e de finale à Melbourne il y a quelques semaines. "Un jour, vous êtes dans le Top 10, un autre, vous n'y êtes plus, donc il faut continuer à travailler et s'autoriser à s'épanouir de ces expériences. Il faut en quelque sorte s'autoriser à courir après ces moments qui ont marché pour vous lors des précédentes années, et faire de son mieux encore et encore. C'est douloureux et les moments de gloire ne sont pas si nombreux. Dans une carrière, il y a juste bien plus de moments durs à gérer, de souffrance, que de moments de succès. Ceux-là représentent un très petit pourcentage de ce qu'un joueur de tennis vit quotidiennement", philosophait-il dans son style caractéristique devant les journalistes.
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Fritz écarte Tsitsipas et s'offre un rendez-vous avec Djokovic : le résumé de sa victoire

Problèmes physiques et tennis trop propre

Que s'est-il donc passé pour que lui-même se résigne à un pareil sort ? Il y a eu certes des pépins physiques, à l'épaule en février-mars 2023, une blessure qui a coupé son élan après sa belle odyssée australienne, puis au dos en fin de saison dernière, avec un abandon pour la terminer contre Holger Rune au Masters de Turin. Mais le mal est plus profond, son bilan face à l'élite du jeu est sans appel : Tsitsipas n'a gagné qu'un seul de ses 9 matches face au Top 10 l'an passé, qui plus est contre un Alexander Zverev éreinté après un long combat face à Ugo Humbert à Bercy. Il reste même sur quatre défaites contre des membres du Top 20.
"Je suis un peu perplexe devant la trajectoire de Stefanos Tsitsipas qui a été très belle et ascendante pendant un moment, observe Jean-Paul Loth, consultant pour Eurosport. Mais c'est vrai qu'il a un type de jeu qui fait aussi briller les autres, à la Federer. Ce style très brillant, fondé sur un maximum de coups exceptionnels. Tsitsipas est dans le même registre, mais il n'est pas exclu qu'il n'ait ni le même talent dans la raquette d'une part, ni physiquement ni mentalement d'autre part que Federer. Ses adversaires profitent en quelque sorte de ce beau tennis pour l'agresser et jouer encore mieux que lui."
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La douleur était trop forte : les images de l'abandon de Tsitsipas face à Rune

Comment jouer un tennis brillant pourrait-il donc rendre si vulnérable ? Ce que l'ancien capitaine de l'équipe de France de Coupe Davis pointe du doigt, c'est la qualité des frappes du Grec. Il en ressort des balles trop propres, trop franches pour ses rivaux qui ne se privent pas de s'appuyer dessus. C'est le cas à la fois pour les cadors – Carlos Alcaraz l'a cruellement montré lors d'un quart de finale à sens unique à Roland-Garros –, mais aussi pour d'autres joueurs en pleine progression ces derniers mois comme Ugo Humbert à Shanghai ou Arthur Fils à Anvers. Depuis son opération au coude fin 2021, Tsitsipas semble ainsi moins capable de générer du lift côté revers et ne s'est pas doté non plus d'un slice performant de ce côté pour se rendre plus imprévisible.
Il a quand même pas mal de caractère, l'heure est venue d'entendre un autre discours
Mais s'il a stagné et même régressé en 2023, c'est aussi à cause d'une certaine pagaille dans son encadrement. Alors que le duo entre son père Apostolos et Mark Philippoussis semblait bien fonctionner en Australie, il a volé en éclats au printemps, Tsitsipas expliquant clairement que les deux discours différents le perturbaient. Il a alors écarté l'ex-champion australien au profit de son père, avant de… le rappeler lors de l'été avec un titre à la clé – son seul de la saison – à Los Cabos où il fait d'ailleurs sa rentrée cette semaine. L'idylle n'a cependant pas duré puisqu'après des résultats décevants à Toronto et Cincinnati, le Grec a réengagé son père. En revenant à la case départ, il a ainsi acté une forme d'impasse.
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"Tsitsipas doit faire sa révolution"

A 25 ans, ce creux n'est pas dramatique, mais il s'agirait de réagir pour se donner un nouvel élan. "C'est son affaire. Quelques fois, je suis sur les tournois et je regarde un peu la relation entre le père et le fils. Je ne suis pas totalement certain que ce qui se fait entre les deux soit le mieux sur le court. Enfin, ce n'est quand même pas mal parce qu'Apostolos l'a tout de même amené à ce niveau-là et il ne faut pas être méchamment et vainement critique", nuance Jean-Paul Loth.
Avant d'ajouter : "Mais peut-être que l'heure est venue pour Tsitsipas d’entendre un autre discours, ou même si c'est le même discours que ça lui sonne différemment aux oreilles et qu'il le traduise différemment sur le court. J'espère qu'il va revenir dans le Top 10 parce que je crois qu'il a quand même pas mal de caractère, mais il y a sûrement deux-trois choses à changer dans sa manière de jouer sur le plan tactique."
Si Tsitsipas a ressenti le besoin d'engager quelqu'un d'extérieur comme Philippoussis, c'est bien qu'il sentait que cela pourrait lui donner un nouvel élan. L'exemple de Jannik Sinner, qui s'est séparé de son coach de longue date Riccardo Piatti pour franchir le palier suivant grâce au duo Simone Vagnozzi-Darren Cahill, pourrait l'inspirer. Mais quand votre mentor est aussi votre père, tout est forcément plus compliqué émotionnellement. En attendant un hypothétique grand rebond en avant, le Grec va tenter de se rassurer au Mexique où il est champion sortant. Avant peut-être d'avoir les idées plus claires sur ce qu'il veut faire de la suite de sa carrière.
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