Open d'Australie 2024 : Peut-on douter de Novak Djokovic, touché au poignet ? "S'il s'aligne, c'est qu'il est prêt"

Il faut se méfier des animaux blessés. Enfin de certains plus que d'autres. Novak Djokovic appartient de façon certaine à la catégorie des plus dangereux. Il est vrai que, mis à part une opération au coude droit début 2018, le Serbe a su gérer son immense carrière de main de maître sur le plan physique en évitant les blessures graves. Mais quand son corps l'a (un peu) lâché ces dernières années, le Serbe a su faire de ses petites faiblesses une force pour repousser ses limites.

Touché, mais pas coulé. Djokovic a fait le coup à deux reprises à Melbourne lors de ses… deux derniers titres à l'Open d'Australie en 2021 et 2023. Alors quand son poignet droit l'a visiblement fait souffrir la semaine dernière lors de ses deuxième et troisième matches de United Cup, l'inquiétude était toute relative. Même après avoir perdu contre un Alex de Minaur en feu devant son public à Perth, le numéro 1 mondial a dédramatisé, insistant sur ces références passées et sur la dizaine de jours qui lui restait pour être prêt. Reste que la communication et la réalité sont parfois différentes. Alors y a-t-il lieu de s'inquiéter ?

"Novak a prouvé l'an dernier qu'une blessure n'allait pas le retenir, considère notre consultant Mats Wilander. Il était blessé à la cuisse gauche, et pour compenser, il frappait son coup droit plus fort qu'il ne l'avait jamais fait durant sa carrière. Selon ses sensations, il fait ces ajustements. Il a 36 ans, peut-être qu'il sent un petit peu son âge et le comprend en se disant : 'Ok, je ne peux pas jouer de trop longs échanges, je dois écourter les points dicter ma volonté. ' S'il s'aligne, c'est qu'il est prêt à jouer."

Djokovic a d'ailleurs tapé pour la première fois la balle sur la Rod Laver Arena de Melbourne mardi lors d'une séance d'entraînement où aucune gêne apparente n'était à signaler. Décuple champion en Australie et tenant du titre, il s'y sent comme chez lui. Après quelques jours de repos, il va tenter de monter progressivement en puissance pour laisser cette gêne derrière lui. A 36 ans, sa connaissance de l'épreuve qui l'attend comme des éléments extérieurs, ainsi que son envie de botter les fesses des jeunes loups le placent au-dessus de la mêlée, encore et toujours.

"Avec les années, Novak Djokovic a affûté son analyse tennistique. Quand vous avez été si longtemps sur le circuit, l'expérience devient prépondérante. Il réalise que ces jeunes, les Carlos Alcaraz, Jannick Sinner et autres Stefanos Tsitsipas, frappent la balle plus fort que lui. Certains sont plus grands et servent plus fort. Mais il fait plus de choses dans son tennis : il utilise son slice, distille des amorties, vient au filet. Mais la chose la plus impressionnante, c'est le feu qui l'habite. Tout le monde acquiert plus d'expérience et apprend avec les années, mais rares sont ceux qui conservent ce feu. Et en lui, il semble brûler encore plus qu'il y a 15 ans", souligne Mats Wilander.

Reste que si la douleur persiste, il lui faudra la gérer. Il a certes montré sa capacité hors normes à le faire en gagnant avec deux déchirures musculaires précédemment à Melbourne, aux abdominaux en 2021 et donc à la cuisse en 2023. L'exploit semblait si irréel que la réalité de ces blessures a à chaque fois été remise en cause autant par certains de ses collègues – l'ironie de Taylor Fritz battu au 3e tour voici trois ans en disait long – que par des observateurs et médecins. Djokovic avait d'ailleurs promis un documentaire sur le sujet dont la sortie a été régulièrement repoussée.

Mais Craig Tiley, directeur de l'Open d'Australie, avait aussi défendu le Serbe en dévoilant que ce dernier souffrait une déchirure de 3 centimètres l'an passé. Une chose est certaine : dans l'adversité, le "Djoker" n'a pas d'égal. Mieux que quiconque sur le circuit, il sait faire face aux obstacles qui lui sont présentés. Si le poignet droit semble être une zone encore plus problématique que ce qu'il a connu par le passé car exposée directement aux impacts entre raquette et balle, il se connaît mieux que personne et est un expert de l'approche physique des quinzaines - et de la gestion des jours de repos - pour en avoir conclu 24 victorieusement.

"Il faut se souvenir de ce qui s'est passé il y a quelques semaines au Masters Turin où il avait perdu contre Jannick Sinner en poules, tôt dans le tournoi, insiste Mats Wilander. Quatre ou cinq jours plus tard, il a battu Carlos Alcaraz facilement en demi-finale (6-3, 6-2), et a pris sa revanche tout aussi aisément sur Sinner en finale (6-3, 6-3). Donc Novak Djokovic n'a pas besoin d'évoluer à son meilleur niveau pendant les deux semaines de l'Open d'Australie. Il va essayer de trouver sa plénitude avant que le tournoi ne soit fini. Que ça se passe au 3e tour ou après deux sets en finale, il va y arriver. Et une fois que ce sera le cas, c'est le meilleur joueur du monde, le meilleur de tous les temps."