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Top 100: L'essai et le casse du siècle

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 12/06/2013 à 18:45 GMT+2

Suite de notre Top 100 des grands moments du sport français de ces 30 dernières années. Mercredi, cap sur Twickenham. 1991. Des Anglais. Des Français. Un essai.

Top 100 Twickenham 1991 Angleterre France

Crédit: AFP

70. BORDEAUX, LE SOUFFLE DE LA FOLIE
C'était quoi? Une de ces soirées où tout ce qui était, au mieux, improbable, vous semble accessible. Une soirée qui vous marque une carrière et une vie.
L'histoire: Bordeaux vit une saison pour le moins paradoxale en 1995-96. Catastrophiques en Ligue 1, les Girondins n'ont même pas encore assuré leur maintien quand arrive le printemps. Ils termineront à une piteuse 16e place. Avec Zidane, Dugarry et Lizarazu, l'équipe dirigée depuis l'élimination en Coupe de France par Gernot Rohr, un ancien de la maison, ne manque pourtant pas de talent. Mais elle n'en finit plus de payer les efforts consentis aux quatre coins du continent. Il faut dire que Bordeaux a entamé sa campagne dès l'été1995 via la très oubliable Coupe Intertoto. C'est grâce à elle que les Girondins décrochent leur billet pour la Coupe UEFA. Au fil des matches et des tours (ah, ce but de 45 mètres de Zidane sur la pelouse du FC Séville…), la campagne prend un petit parfum d'épopée. Gentiment. Mais ce sont les 90 minutes du match retour contre l'AC Milan qui vont lui donner toute sa dimension. Battu à l'aller 2-0 à San Siro, Bordeaux n'a que très peu de chances de rallier le dernier carré. Jamais, dans son histoire, le Milan n'a été éliminé après une victoire 2-0 à l'aller à domicile. C'est dire.
Beaucoup de ceux qui ont eu la chance de vivre cette soirée au stade disent avoir ressenti, bien avant le match, une atmosphère particulière. Quelque chose d'inexplicable mais de palpable. Un parfum électrique, entrainant spectateurs et joueurs dans un même élan, comme pour convaincre les uns et les autres que l'impossible ne l'était plus. L'enceinte bordelaise n'a jamais résonné de façon aussi particulière qu'en ce 19 mars 1996. La suite, chacun la connait. Un but de Didier Tholot avant même la fin du premier quart d'heure. Puis un doublé de Christophe Dugarry en six minutes au coeur de la seconde période (64e, 70e). Milan, secoué puis sonné, a oublié de jouer. Le réveil lombard, notamment via son Ballon d'Or George Weah, sera trop faiblard et trop tardif. Balayé 3-0, l'AC Milan quitte la scène la tête basse. 18 ans que Milan n'avait plus perdu par trois buts d'écart en Coupe d'Europe. Jusqu'au carton du Barça mardi soir, c'était même la seule élimination de l'histoire des Rossoneri après avoir gagné le match aller 2-0. Mais ce Bordeaux-là, le temps d'une soirée pas comme les autres, avait la force de repousser toutes les limites. Même les plus improbables. 
Quelle portée? C'est la plus grande heure de gloire des Girondins sur la scène européenne. Bordeaux a pourtant connu de grands moments, notamment à travers l'équipe d'Aimé Jacquet dans les années 80. Celle de Giresse, de Tigana, Lacombe, Girard et Cie. L'équipe de 1985, demi-finaliste de la Coupe des champions avant de tomber avec les honneurs contre la Juventus, était d'une toute autre envergure que celle de 1996. Mais cette victoire contre Milan est la victoire la plus folle, la plus forte, la plus inoubliable. C'est aussi, à l'échelle du football français, un de ces exploits majuscules qui demeurent rares pour les clubs hexagonaux, en tout cas face à des pointures du calibre de l'AC Milan. Ce fut aussi le point d'orgue de la carrière (de club, au moins) de Dugarry, sur un nuage ce soir-là. Son doublé lui a ouvert les portes du Milan (dès la fin de la saison) puis celles du Barça. Il n'y brillera guère, comme si la magie de cette folle soirée du 19 mars 1996 n'avait pu se prolonger. Mais elle a eu le mérite d'exister.
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desailly zidane milan AC bordeaux

Crédit: Eurosport

69. DEFRASNE, UNE GRENOUILLE DEVENUE PRINCE
C’était quoi ? Avant tout, un mano a mano qui restera comme l’un des grands moments des Jeux olympiques de Turin. Un sprint de légende, une course unique qui a permis à Vincent Defrasne de devenir le premier Français champion olympique de biathlon.
L’histoire : On est le 18 février 2006. Cesena San Sicario. Vincent Defrasne connaît bien l’endroit. Avant cette poursuite olympique, l’éternel second de Raphaël Poirée n’a rien laissé au hasard. Aux côtés d’Ole Einar Bjoerndalen, il est venu en repérage lors des Championnats d’Italie qui ont eu lieu quelques semaines en amont. Bref, cette piste olympique, l’homme de Pontarlier la connaît par cœur. Et ce 18 février restera son jour à tout jamais. A 28 ans, il pressent que son heure est venue d’écrire l’histoire. Mais de cette poursuite, on ne retiendra finalement que les 800 derniers mètres. Comment en pourrait-il être autrement ? Quelques minutes avant cette explication finale avec l’ogre OEB, celui qu’on surnomme "Grenouille", alors largement en tête, a commis ses deux premières fautes au tir du jour. Deux tours de pénalité qui ont remis le quintuple champion olympique, revenu à six petites secondes du Français, dans la course à la médaille d’or. 
A 800m du but, donc, le Norvégien a refait son retard. OEB passe Defrasne. Dans l’ultime virage en épingle, le Français s’emmêle les bâtons et passe tout près de la catastrophe. La chute est évitée et l’adrénaline décuplée. Dans l’aspiration de Bjoerndalen, le Français déboîte alors le dossard 12 et à 100m de la ligne, dépose littéralement le maître.  OEB abdique : "Quand Vincent m’a doublé, je n’avais plus la force pour en remettre un dernier coup : j’ai tenté mais je ne pouvais plus", reconnaît le plus grand biathlète de tous les temps après coup. Defrasne peut savourer. Il vient d’offrir une troisième médaille d’or au clan tricolore à Turin, la deuxième pour le biathlon français. Et de toucher la grâce. Pour l’éternité. 
Quelle portée ? Avant ce triomphe olympique, Vincent Defrasne n’avait gagné qu’une fois en Coupe du monde, le 7 janvier 2006 à Oberhof. De ses propres aveux, cette médaille n’a pas changé sa vie. "Je déteste les fanfarons. Je ne suis pas Zidane non plus. D’accord, on parle de nous aujourd’hui, mais cela va vite retomber", avoue-t-il à L’Equipe.  A la fin de la saison, il termine sixième du général. Son meilleur résultat en carrière. Un autre succès en Coupe du monde suivra en 2008 à Kontiolahti. En 2010, pour les JO de Vancouver, il est désigné porte-drapeau avant de raccrocher quelques semaines plus tard.  
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68. MANAUDOU AU SOMMET DE SA MONTAGNE
C'était quoi? Le sommet d'une glorieuse carrière. Une championne sur les cimes de son talent, juste avant le déclin, abrupt et impitoyable.
L'histoire: Laure Manaudou n'est rien de moins qu'une des plus grandes championnes de l'histoire du sport français. Et si son déclin aura été aussi brutal que sa fulgurante ascension, ce qu'elle a accompli pendant quatre saisons, de 2004 à 2007, appartient au livre d'or du sport hexagonal. Triple médaillé olympique à Athènes, dont un titre, elle effectue également une razzia aux Championnats d'Europe de Budapest en 2006 (quatre titres, six médailles) et s'offre la même année le mythique record du monde du 400m de Janet Evans. Aux Mondiaux, elle n'est pas en reste, avec une médaille d'or en 2005 à Montréal. Deux ans plus tard, elle va faire encore plus fort. A Melbourne, pour la dernière fois, son destin sportif est encore lié à celui de son entraîneur, Philippe Lucas. Elle nage au sommet de son art. Elle confirme sa suprématie sur 400m (distance sur laquelle elle a tout gagné depuis l'Euro 2004) et ajoute une autre médaille d'or, sur 200m nage libre avec, en prime, le record du monde à la clé. Laure conquiert trois autres médailles, deux en argent avec à chaque fois le record d'Europe à la clé (800m libre et 100m dos) et le bronze sur le relais 4x200m. Elle est désignée meilleure nageuse des Mondiaux, titre qu'elle partage avec Michael Phelps et, en fin d'année, est désignée championne de l'année par le journal américain Swimming magazine. Du jamais vu pour une Française. Elle est la sportive préférée des Français. C'est une star, une icône. Mais à force de se rapprocher du soleil, Manaudou va finir par se brûler. En quelques mois, le mythe naissant va s'effriter puis s'écrouler. Séparation avec Philippe Lucas, amours contrariés en Italie, résultats en berne, jusqu'au burnout des Jeux de Pékin. La carrière de Laure Manaudou s'est, d'une certaine manière, arrêtée pour de bon à Melbourne au printemps 2007. Mais ce printemps-là, c'était le sien. Le monde était à ses pieds.
Quelle portée? Bardée de champions et de championnes, la natation française est gâtée en ce moment. Mais personne, ni avant ni (pour l'instant en tout cas) après elle, n'a eu autant d'impact pour l'essor de ce sport en France que Laure Manaudou. Et personne n'a encore réussi à accomplir sur une même compétition ce qu'elle a réussi à Melbourne en 2007. La championne d'exception qu'elle fut semble aujourd'hui une femme bien dans sa peau. C'est son autre victoire.
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67. LA DEMI-FINALE FRANCE-PORTUGAL
C'était quoi? Une grande fête, bien près d'être gâchée. Une grosse frousse, suivie d'une immense libération. Un héros inattendu. Et une course folle au bout de la nuit.
L'histoire: Dans cet Euro 1984 à domicile, tout a d'abord semblé très facile pour l'équipe de France. Presque trop. Après son premier tour tranquille (victoires 1-0, 5-0 et 3-2 face au Danemark, à la Belgique et à la Yougoslavie), l'élimination de la R.F.A. offre aux Bleus une demi-finale contre le Portugal. Adversaire beaucoup plus abordable a priori que la Mannschafft, pour des raisons qui tiennent au moins autant au mental qu'au football. Nous sommes moins de deux ans après la nuit noire de Séville, qui a marqué au fer rouge la génération Platini. Le Portugal n'a pas ce passif face aux Français. Après l'ouverture du score, signée Jean-François Domergue, l'idée d'une demie relativement paisible fait plus que jamais son chemin. Mais un but de Jordao envoie les deux équipes en prolongation et un autre but de Jordao place les 55.000 spectateurs du Vélodrome (moins grand que l'actuel mais un an avant le Heysel, c'est encore la fête des places debout, moins gourmandes en place).
Là, cet Euro qui ne pouvait pas échapper aux joueurs d'Hidalgo a un gros coup de plomb dans l'aile. Trois hommes vont alors unir leurs efforts pour sauver la patrie bleue. Domergue, d'abord. Déjà auteur du premier but, il s'offre un doublé en égalisant dans la prolongation. Il est à ce France-Portugal ce que Lilian Thuram sera au France-Croatie de 1998. Un héros inattendu. Lui aussi, ce sont ses deux seuls buts en équipes de France. Ils en valent vingt autres. Domergue n'était même pas titulaire en début de tournoi. Jusqu'à ce que Manuel Amoros perde les pédales en distribuant un coup de boule à un Danois qui passait par là. Le destin des héros tient parfois à peu de choses. Celui de Michel Platini est moins surprenant. Presque comme une évidence, c'est lui qui plonge le Vélodrome dans un véritable délire euphorique en inscrivant le but de la victoire juste avant ces tirs au but dont personne n'avait envier. Mais ce but, plus que celui de Platoche, c'est celui de Jean Tigana. Son rush extraordinaire, ponctué d'une merveille de passe en retrait pour le numéro 10 des Bleus, a fait rêver des générations de milieu défensif. Le Vélodrome est ce soir-là un petit Sanchez-Pizjuan à l'envers. Comme à Séville, beaucoup d'émotions contradictoires. Mais la dernière a le bon goût de ne pas laisser d'amertume et de sanglots au fond de le gorge. Comme si le destin, conscient de son injustice, avait voulu rendre (un peu) de ce qu'il avait pris aux Bleus en Espagne.
Quelle portée? La victoire suivante, en finale, contre l'Espagne, pèse évidemment bien plus lourd dans l'histoire du football français. Mais sans cette chaude et folle nuit marseillaise, pas de France-Espagne, pas de finale au Parc, pas d'Arconada et pas de premier titre majeur. Une victoire majuscule, donc, parce que les Bleus, au-dessus du lot dans ce tournoi, ont su aussi aller chercher ce trophée avec leurs tripes.
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66. L'ESSAI DU SIECLE
C'était quoi? Un de ces moments rares qui n'appartiennent qu'au rugby français, qui font sa légende et génère l'image qui est la sienne chez nos cousins rugbystiques à l'étranger.
L'histoire: C'était en 2009. Lors d'une cérémonie très officielle pour le centenaire de Twickenham, Philippe Saint-André a  reçu un trophée, celui du plus bel essai jamais inscrit dans ce temple du rugby. L'essai du siècle.  Un cocktail détonnant d'instinct, d'audace et de folie créatrice. Il fallait tout cela pour entreprendre un tel projet et le mener à bien, 103 mètres plus loin. Tout part d'une pénalité manquée par Simon Hodgkinson, le buteur anglais. "J'aime rappeler que je suis à l'origine de tout ça", aime-t-il encore à plaisanter. Le ballon arrive dans les mains de Pierre Berbizier, dans son en-but. Au lieu de taper, de se dégager, les Français tenter de relancer. Blanco initie le mouvement. Il trouve en relais Lafond puis Sella, l'inimitable, l'idole du peuple anglais, qui a toujours voué une admiration teintée de jalousie au centre agenais. Celui-ci croise ensuite avec Didier Cambérabéro, auteur d'un véritable coup  de génie. Le long de la ligne de touche, il tape à suivre pour lui-même, avant d'adresser un nouveau coup de pied de recentrage, plein champ, pour mettre définitivement la défense anglaise hors de portée. "C'était le symbole de le perfection, témoigne le centre anglais Jeremy Guscott. Il fallait à la fois de l'intelligence et de la dextérité pour effectuer ce petit coup de pied pour lui-même, en pleine course. Vous pouvez le tenter 10 fois, vous aurez de la chance de le réussir une seule fois." Voilà donc comment Philippe Saint-André récupère le ballon à 15 mètres des poteaux anglais. Il n'a plus qu'à filer sous les perches. Twickenham est debout. C'est l'essai de Saint-André, pour l'éternité, mais il ne fut que le dernier maillon d'une géniale chaine. Si vous regardez bien les images, vous verrez Guscott rester au sol une fois que PSA a aplati. "En essayant de le plaquer avant qu'il ne marque, raconte l'intéressé, j'ai pris la chaussure de Philippe juste sous l'œil gauche. Depuis ce jour, j'ai une petite cicatrice. Quand je commente sur la BBC, on ne la voit pas, parce qu'on rajoute un peu de maquillage à cet endroit. Le génie français m'a marqué à vie!"
Quelle portée? Ce match, les Français l'ont perdu (21-19) mais, à vrai dire, si la déception était réelle sur le coup, 20 ans après, tout le monde s'en fout. Les Bleus peuvent bien l'avoir perdu, il n'en reste rien d'autre que ce moment magique. C'est toute la différence entre le résultat, froid, et le souvenir, dont la chaleur ne s'efface jamais. La victoire a procuré une juste satisfaction aux Anglais. L'essai de Saint-André nous a laissés une trace de bonheur, partagé par tous, les Anglais compris. Pour sa première à Twickenham comme sélectionneur, au mois de février, Philippe Saint-André a eu le privilège d'être applaudi par le public londonien. Ça n'a pas de prix. Une façon de dire "merci et bravo". Ça change du "sorry, good game." Même si les deux ont leur charme.
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Top 100 Essai Saint-Andre

Crédit: From Official Website

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