Coupe du monde de biathlon | Laegreid, Perrot, Giacomel, Wright... : Le roi Johannes Boe s'en va : qui va lui succéder ?

L'hégémonie n'a pas pris fin comme on l'imaginait. Et on ne saura jamais si Johannes Boe aurait décroché un sixième gros globe de cristal s'il avait été épargné par un virus qui l'a, notamment, contraint à renoncer à la mass start de Pokljuka. Qu'importe, le constat demeure inchangé : le Norvégien va laisser un grand vide.

Heureusement, la nature en a horreur. Les biathlètes, encore plus. "Depuis le début des années 2000, il n'y a pas eu beaucoup de vainqueurs différents du classement général de la Coupe du monde, souligne notre consultant Loïs Habert. Chez les garçons en particulier, c'est assez dingue." Il y avait eu Raphaël Poirée au début du siècle. Puis Ole Bjoerndalen. Puis Martin Fourcade, auquel Johannes Boe a donc succédé.

Un nouveau roi va-t-il s'installer durablement sur le trône ? "Si ce n'est pas le cas, ce sera nouveau pour tout le monde, insiste notre expert. Mais je ne suis pas sûr que ça change." Car il y a quelques candidats. À commencer par Sturla Laegreid, vainqueur du gros globe cette saison et trois fois deuxième du classement général entre 2021 et 2023. "Sturla est un athlète fantastique, a insisté Boe après avoir été interrogé à ce sujet. Il tire bien, vite et il est très intelligent. Il faudra compter sur lui."

"On a connu ça en France, renchérit Loïs Habert. Quand Raphaël Poirée est parti à la retraite, tout le monde - les médias, les coaches - disaient que ça allait être la cata. À juste titre car derrière, on n'avait pas le niveau pour gagner un général. On nous a dit : 'ça va être la traversée du désert'. Finalement, Martin [Fourcade] est arrivé. Mais quand la place se libère, ça laisse parfois émerger quelqu'un. Laegreid semble admirer énormément Johannes, peut-être a-t-il même eu un peu de crainte. Le fait qu'il ne soit plus là peut lui permettre de devenir le patron."

Par son talent, sa régularité, son palmarès et son expérience, le Norvégien a la pancarte. Mais il a déjà 28 ans et il n'incarne pas tout à fait un renouveau. "L'équipe de France a des jeunes qui poussent, notait Boe. La Norvège aussi." Parmi eux, difficile de ne pas penser à Éric Perrot. Le Français de 23 ans a déjà terminé troisième du général en remportant plusieurs épreuves, et a décroché un titre de champion du monde de l'Individuel à Lenzerheide. Si Poirée et Fourcade doivent avoir un successeur, c'est sûrement lui.

"Je ne suis pas certain qu'il y ait vraiment une place à prendre, nous a répondu Perrot lorsqu'on l'a questionné sur la succession de Boe. La place sera rapidement prise par un nouveau jeune Norvégien. Jeune ou moins jeune, d'ailleurs, puisqu'il y a énormément de densité chez eux. J'ai parfois préféré me battre contre un Johannes sur la fin que contre un jeune sur la pente ascendante qui a très faim. Donc je ne suis pas certain qu'il y aura une place à prendre. Simplement, le roi part. Il laisse son trône et je pense qu'on sera nombreux à vouloir le récupérer. Ce qui est sûr, c'est que je ferai partie de la bataille. On verra qui la gagnera."

Chez les Norvégiens, Martin Uldal, l'un des nouveaux vainqueurs cette saison en Coupe du monde, capable de se démarquer par des tirs exceptionnellement rapides, est l'un des visages de cette relève. Il est issu de la même génération que Perrot mais il s'est contenté de la 11e place du général au milieu d'un contingent norvégien où la concurrence est rude, avec Vebjoern Soerum (9e, 26 ans) ou Endre Stroemsheim (13e, 27 ans).

Il faudra surtout surveiller un homme qui n'a pas encore pointé le bout de son nez en Coupe du monde : Isak Frey, 21 ans et vainqueur du gros globe de l'IBU Cup après avoir écrasé la saison. Bref, il y a toutes les chances que la bataille pour le trône se résume en un nouveau match entre la France et la Norvège. À moins que l'excellent Tommaso Giacomel, 24 ans et vainqueur de la mass start à Ruhpolding, ne déplace l'épicentre en Italie. Révélation des Mondiaux, Campbell Wright (22 ans) part de plus loin mais il présente lui aussi un potentiel intéressant. Vivement la saison prochaine.