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Mondial 2014 - Suisse : un huitième ? Pour quoi faire ?

Polo Breitner

Mis à jour 25/06/2014 à 23:23 GMT+2

A l’aube de son dernier match capital dans le groupe de la France, la Nati peut déjà préparer son avenir et tirer le bilan d’une Coupe du monde somme toute mitigée. Et même une qualification pour les huitièmes de finale n’enlèverait pas une certaine déception.

La Suisse salue son public à la fin du match contre la France

Crédit: Panoramic

Oui, c’est un petit peu du football fiction. A l’heure où je bafouille ces quelques lignes, les joueurs sélectionnés par Ottmar Hitzfeld sont toujours en course au Mondial brésilien. Pourtant, l’opération séduction que j’évoquais dans un billet ici-même, il y a quelques jours, semble avoir échoué. La Suisse, ultra solide depuis deux ans, a explosé en plein vol.
En France, on achète d’un seul coup du Mirror pour faire briller une hypothétique deuxième étoile. De l’autre côté de l’Arc jurassien, le supporter en fait tout un fromage. Ou comment revisiter la théorie des vases communicants à l’aune du ballon rond.

Un pêché d’orgueil contre la France ?

L’Histoire est toujours écrite par les vainqueurs. C’est un petit peu restrictif mais c’est ainsi depuis la nuit des temps. La planète football n’y échappe pas. Après la victoire contre l’Equateur (2-1), les médias nationaux et mondiaux ont bien entendu loué le coaching d’Ottmar Hitzfeld. Les entrées sur le terrain de Mehmedi puis de Seferovic, synonyme des trois points, vit même un Oliver Kahn s’exprimer, dans un média alémanique bien connu, sur le génie du sélectionneur germano-suisse qui sent  qu’il faut faire quelque chose . Et pourtant la Nati a-t-elle pris des risques ? Hitzfeld a-t-il touché à son système ? A son organisation ? A son milieu ? A-t-il recherché le déséquilibre en maintenant un Behrami déjà très moyen ? La réponse est bien entendu négative. Car Hitzfeld, c’est le classicisme absolu. Un peu comme une caricature de vieux professeur britannique qui enseigne dans une english School les tragédies grecques. Seulement.
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Ottmar Hitzfeld, le sélectionneur de la Suisse, lors de la Coupe du monde 2014.

Crédit: Panoramic

Contre les Bleus, les erreurs de jugement furent grossières. Behrami avait enfilé le maillot tricolore, confirmant sa mauvaise passe actuelle. Benaglio oubliait son soupirail sur le but de Matuidi. Mais surtout, au lieu de jouer bas et de contrer, la Suisse a voulu justifier son statut de tête de série en défiant l’équipe de France au milieu. Hitzfeld récompensant même les deux buteurs : Mehmedi, comme lors des matches de préparation, jouait sur la gauche alors que c’est derrière l’attaquant qu’il est le plus performant et Seferovic, très moyen avec la Real Sociedad cette saison, pointait… en pointe. Désolé, on ne m’enlèvera pas de l’idée que Stocker ou Drmic offraient plus de possibilités dans un schéma bien différent que celui proposé. Au lieu de cela, la Suisse a explosé sur son supposé point fort, le bloc défensif. Sans oublier que les quatre joueurs offensifs n’avaient que 22 ans de moyenne d’âge.
La perception de la Nati n’a pas évolué. Cela ne reste que la Suisse se dira la grande majorité des gens. Peut-on leur donner tort ? Granit Xhaka confirmant ce leitmotiv malheureux avec un nous ne sommes finalement, toujours, que la petite Suisse .

Euro 2016 : Mon boulot de dans deux ans

C’est donc avec la perspective peu alléchante de l’Euro 2016 que je considère ce Mondial brésilien comme un déception, malgré une qualification toujours envisageable. Le système passe-partout d’Ottmar Hitzfeld bride les qualités intrinsèques de cette équipe. Aussi tournons-nous vers l’Euro en France.
L’arrivée de Vladimir Petkovic pourrait faire un bien fou. Ce sera une réussite si le niveau de jeu produit atteint celui de la Lazio Rome version 2012-2013. Mais faut-il pour autant réformer complètement les schémas de jeu et l’animation de l’équipe ou bien s’arrêter uniquement sur les cas individuels ? In fine, les 23 joueurs choisis pour disputer le mondial brésilien seront tous opérationnels dans deux ans. Steve von Bergen émergera en 2016, à 33 ans, comme le professionnel le plus âgé de la Nati. Rien de dramatique donc de ce côté-là, d’autant plus que c’est un axial.
La correction contre la France ne doit pas faire oublier deux années quasi sans défaite. En revanche, l’image d’une Nation qui encaisse peu de buts en a pris un coup. Le gardien numéro 1, Diego Benaglio n’a pas été parfait et sa présence en tant que titulaire n’est que le choix du sélectionneur. Yann Sommer est plus jeune et il a les qualités de sa relative petite taille. Sans oublier de mentionner le petit dernier, Roman Bürki. Oui, une guerre des goals en Bundesliga s’annonce…Tant mieux !
La charnière centrale est-elle aussi à repenser ? Djourou montre, match après match, ses limites malgré sa bonne volonté et son engagement. Et l’on comprend facilement sa carrière en dents de scie, notamment son passage à Arsenal. Senderos ne devrait-il pas s’occuper de retrouver une place de titulaire en club plutôt que de viser la sélection nationale ? Une remarque qui vaut aussi pour un absent, Timm Klose, aussi brillant à Nuremberg qu’inexistant à Wolfsburg. L’heure de Fabian Schär a sonné, semble-t-il. Mais doit-on associer un stoppeur à un autre Manndecker dans l’axe ? La paire Djourou-Schär semble le plus logique dans ces conditions. C’est lourd, c’est dense, c’est costaud. Mais Hitzfeld a préféré le plus libero von Bergen, meilleur dans la relance. Un choix stratégique que je défends surtout si Petkovic a l’idée de penser à Fabian Lustenberger, 26 ans,  excellent au Hertha Berlin cet exercice. Qui plus est polyvalent. En espérant que les blessures le laissent enfin tranquille.
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Hat die WM noch nicht ganz abgeschrieben: Hertha-Kapitän Fabian Lustenberger.

Crédit: SID

Les latéraux, Rodriguez et Lichtsteiner, sont intouchables. Reste à réfléchir au banc. Idem au milieu de terrain où un Pirmin Schwegler mériterait sans doute une nouvelle chance. Il aura la lourde tâche, cette saison, de stabiliser la bloc défensif d’Hoffenheim. A 27 ans, il est loin d’être à la casse. Il pourrait être le grand gagnant de l’arrivée du nouveau sélectionneur, adepte assez souvent d’une formation en 4-1-4-1. Mais honnêtement, avec Inler en chef de file, la question de la récupération n’est pas un souci pour l’équipe. Le Bâlois Fabian Frei n’est que réserviste.
Offensivement, la question du véritable numéro 9 reste d’actualité. Eren Derdiyok, 25 ans seulement et absent au Brésil, jouera sûrement sa dernière carte en tentant de se relancer en Turquie. Il est le pivot dont la Nati a besoin. Il pourrait aussi bénéficier d’un repositionnement sur le côté droit de Drmic au Bayer Leverkusen. Quant à Seferovic, il doit confirmer en club sous peine de rester à quai la prochaine fois. Enfin, Tranquillo Barnetta doit se demander ce qu’il fait au Mondial. Gavranovic mérite t-il vraiment d’être dans les vingt-trois ?

Les U21 suisses à la rescousse ?

Souvent les petites nations du football souffrent d’une densité relativement faible lorsque l’on analyse les forces vives du pays. Il semble que la Suisse démente cet axiome. Bien qu’il parte de loin, on suivra les progrès du jeune gardien du BSC Young Boys, Ivon Mvogo. Mais, il devra déjà vaincre une forte concurrence en club, sans parler de celle de la sélection.
En défense centrale, Berat Djimsiti et Arlim Adjeti sont à citer. Ce dernier à la chance d’évoluer au FC Bâle et dans la restructuration qui se prépare dans le club référence de la Raiffeisen Super League, il pourrait bénéficier d’une expérience européenne non négligeable.
Si les deux places sont prises par Lichtsteiner et Rodriguez aux postes de latéraux, la lutte pour être dans le groupe est ouverte. A gauche, Loris Benito, 22 ans, devrait quitter le FC Zürich pour un club bien plus huppé (Benfica ?) et devenir ainsi un véritable concurrent à Reto Ziegler, au minimum. A droite, c’est la foire d’empoigne ! Si Michael Lang a été choisi par Hitzfeld, Philippe Koch, lui aussi du FC Zürich, frappe à la porte. Sans oublier, par exemple, Silvan Widmer et Martin Angha, plus jeunes, mais qui ont l’avantage de déjà évoluer à l’étranger.
Offensivement, le milieu du FC Fulham, Pajtim Kasami, attend son heure. Il était dans les 30 avant la Coupe du monde, est déjà international et on ne peut que souhaiter, à tout juste 22 ans, son explosion. Reste à savoir à quel poste il désire évoluer. Et surtout l’animation que veut mettre en place Petkovic. Dans un tout autre registre, l’ailier du CSKA Moscou, Steven Zuber, patiente aussi. S’il a rarement été décisif dans le championnat russe, l’ailier a bénéficié d’un temps de jeu plus que convenable pour une première année à l’étranger. Enfin, je citerai aussi un attaquant, Michael Frey, pas encore 20 ans, et déjà repéré par certains clubs européens. Si l’objectif d’une participation à l’Euro 2016 semble ambitieux, il représente, avec son profil, une véritable alternative à moyen terme.
Le hasard a voulu que le tirage au sort donne à la Nati l’occasion de se rattraper de son piteux 0-0 du mondial en Afrique du Sud, synonyme d’élimination, en rencontrant, de nouveau, le Honduras. Comme si l’ère Hitzfeld, qu’il faut saluer, était indécrottable d’une Suisse trop peureuse et victime de la propre histoire de son football. Même une qualification ne me fera pas changer d’avis. J’ai déjà tourné la page, déçu mais pas sceptique. Dommage.
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