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Ligue des champions - Dans le quotidien des joueurs du Ki Klaksvik (Iles Féroé), aux portes des étoiles

Gabriel Baldi

Mis à jour 09/08/2023 à 02:22 GMT+2

En gagnant le 3e tour aller face à Molde mardi soir (2-1) les joueurs du Ki Klaksvik se rapprochent encore de la Ligue des champions. L'exploit de l'été pour ce club des Iles Féroé, 302e au classement UEFA. Comme la plupart des joueurs, Árni Frederiksberg est obligé de continuer à travailler à côté du football. Pour Eurosport, l'ailier international qui a inscrit un doublé mardi, s'était confié.

Árni Frederiksberg devant le stade de Klaksvik

Crédit: Eurosport

Mais quand vont-ils s'arrêter ? Le Ki Klaksvik, 302e au classement FIFA soulève des montagnes. C'était déjà un exploit pour le club de sortir le Ferencvaros au premier tour préliminaire de Ligue des champions. C'était la folie lorsqu'ils ont passé le deuxième tour.
Mardi 9 août, le club féroïen s'est imposé face à Molde lors du match aller du troisième tour préliminaire (2-1). Un pas de plus vers la phase de poule de Ligue des dhampions pour cette bande d'amis emmenés par Arni Frederiksberg. L'ailier international, qui nous avait accordé une interview avant le deuxième tour a inscrit un doublé mardi soir. Il est déjà un héros sur son île.
Les joueurs du Ki Klaksvik doivent composer avec un quotidien à peu près normal. Comme la plupart de ses coéquipiers, Árni Frederiksberg travaille à côté du football. L'ailier international féroïen a accepté de nous raconter son quotidien et cette épopée folle.
Sortir Ferencvaros au premier tour, jouer un deuxième tour de Ligue des champions, ça doit faire quelque chose non ?
Arni Frederiksberg : C'est un rêve, nous sommes très heureux, très excités. Mais en même temps, beaucoup de choses se mélangent, on a du mal à réaliser ce que nous avons réussi (se qualifier au deuxième tour de qualification en Ligue des champions). Tout le monde essaie donc de faire le maximum. Avec le bon résultat la semaine dernière (match nul à l'aller), nous commençons à rêver encore plus grand, mais nous devons garder les pieds sur terre avant le match retour.
L'an dernier vous n'aviez pas réussi à passer le premier tour de qualification, qu'est ce qui a changé cette fois-ci ?
A.F. : La grande différence cette année c'est que nous avons déjà cette expérience des rencontres européennes à élimination. L'an dernier nous avions déjà joué un premier tour. Et nous avons presque la même équipe que l'année dernière donc on continue de se pousser les uns les autres. Bien sûr, c'est historique de jouer la Coupe d'Europe. La victoire à domicile au match retour (face à Bodo Glimt) n'avait pas suffi à nous qualifier au deuxième tour, mais je pense qu'elle nous a marqués et que ça nous permet cette saison de faire mieux.
Ce mois de juillet est-il déjà le meilleur moment de votre carrière ?
A.F. : C'est difficile à dire. J'ai déjà joué de grands matchs, par exemple en 2019 contre l'Espagne, et d'autres grandes rencontres internationales avec la sélection des Îles Féroé. Mais cette victoire contre Ferencvaros et la qualification, c'était encore plus fort. C'est tout simplement incroyable.
"Mon rêve ultime serait de jouer à Anfield, mais pour cela il faudrait qu'on aille en Ligue Europa et pas en Ligue des champions"
Jusqu'où vous voyez-vous aller ?
A.F. : L'objectif reste d'intégrer la phase de groupe en Europe. Que ce soit en Ligue des champions, en Ligue Europa ou en Conférence. Nous devons simplement garder les pieds sur terre et nous focaliser sur notre prochain match pour y arriver.
Dans le meilleur des cas, qui rêveriez-vous d'affronter en phase de poule de Ligue des champions ?
A.F. : Si on arrive à ce stade-là de la compétition, on sera déjà en plein dans un rêve. Donc peu importe les équipes de la poule. Même si affronter le Real Madrid représenterait pour moi quelque chose d'immense, ils ont fait l'histoire de cette compétition.
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Arni Frederiksberg face au Ferencvaros.

Crédit: Getty Images

Et donc dans l'idéal, vous voudriez jouer à Santiago Bernabéu ?
A.F. : Mon rêve ultime serait en fait de jouer un match sur la pelouse d'Anfield. Mais Liverpool n'est pas qualifiée en Ligue des champions cette année. Donc pour les affronter, il faudrait qu'on aille plutôt en Ligue Europa (rires).
Votre parcours est suivi en Europe, c'est important de mettre en lumière le football des Îles Féroé ?
A.F. : Nos derniers résultats marquants remontent à 2014 avec la sélection nationale quand on avait gagné deux matchs face à la Grèce. Mais il s'est écoulé beaucoup de temps depuis… On espère donc que notre parcours permettra aux gens d'entendre parler des Îles Féroé et de notre histoire footballistique. Ici, presque tous les enfants jouent au football, nous avons des stades incroyables.
La BBC a qualifié votre équipe comme étant la meilleure de l'histoire du football féroïen. Qu'est ce que ça vous fait de lire ça ?
A.F. : C'est une immense fierté. Depuis deux ans, on produit un football de très haut niveau. Ça montre bien que nous sommes déterminés à obtenir de très bons résultats. Nous essayons donc de construire notre projet, de progresser. Tout en gardant les pieds sur terre, en ne grillant pas les étapes même quand nous devons jouer contre des équipes incroyables lors des compétitions européennes. C'est aussi très intéressant parce que nous changeons de style de football en fonction de la compétition. En Europe, on doit énormément défendre. Alors qu'en championnat, on a un jeu beaucoup plus offensif.
Vous êtes PDG d'une entreprise. Dites-nous en plus.
A.F : Oui, je suis le PDG de Kjølbro Heilsøla, une société qui importe des produits alimentaires. Nous avons des fournisseurs aux Pays-Bas, en Irlande, en Norvège, en Suède et au Danemark. Nous dépendons donc de ces pays d'Europe pour importer de la nourriture pour les habitants des Îles Féroé.
Pourquoi ne consacrez-vous pas votre vie entièrement au football ?
A.F. : Ici, le salaire des footballeurs n'est pas très élevé. Je pourrais essayer de vivre du football, mais pour moi, il faut regarder un peu plus loin. Je serai obligé de travailler après ma carrière de footballeur. Je ne gagnerai pas d'argent avec le football jusqu'à la fin de ma vie. J'ai ma famille à nourrir, mon fils. J'adore le football, mais j'ai d'autres choses à gérer dans ma vie et il faut de l'argent.
Tout le monde ne s'entraîne pas en même temps"
Comment parvenez-vous à vivre entre ces deux mondes, le football et l'entreprise ?
A.F. : Ce n'est pas facile. Il faut faire des journées énormes avec beaucoup d'heures. Mais en tant que PDG, je ne suis pas obligé de travailler entre 8h et 16 heures comme employé. Donc je travaille plus tôt le matin pour l'entreprise et parfois tard la nuit. Tout est une question d'organisation. Mais je fais des journées où je travaille entre 8h et 9h pour l'entreprise et ensuite je vais jouer au football pendant trois heures. C'est dur pour ma femme, qui veut passer du temps avec moi et qui doit souvent m'attendre (rires).
Racontez-nous le déroulé de la semaine dernière avec le match aller.
A.F. : J'ai travaillé tous les jours de 8h à 16h avec pas mal de réunions et d'appels et je m'entraînais de 17h à 20h avec l'équipe. Mais le mercredi, comme nous jouions le soir, j'ai travaillé jusqu'à midi puis j'ai un peu télétravaillé depuis chez moi, je gère des appels pour l'entreprise puis je dois jouer un match de Ligue des champions. Ensuite, on s'est retrouvé dans l'après-midi avec l'équipe pour manger avant le match et nous avons joué.
Vous parlez un peu de football dans votre entreprise, à la machine à café ?
A.F. : Ces deux dernières semaines, nous n'avons parlé que de ça. Mais globalement, l'ambiance dans la ville dépend de nos résultats. Tout le monde, les femmes, les enfants, parlent de football. Alors avec ces résultats fantastiques, il y a une vraie effervescence.
Vos coéquipiers travaillent-ils aussi à côté du football ?
A.F. : Oui, il y en a beaucoup qui sont obligés de travailler. Certains sont électriciens, d'autres machinistes, d'autres travaillent sur leurs bateaux ou font le ménage. Il y a aussi pas mal d'étudiants.
Il n'est pas difficile de créer une énergie de groupe, avec toutes ces contraintes ?
A.F. : C'est un travail énorme d'organisation pour l'entraîneur (rires). Nous devons nous responsabiliser mais le fonctionnement est un peu particulier. Tout le monde ne s'entraîne pas en même temps, c'est en fonction de nos horaires de travail. Ceux qui ne travaillent pas le matin s'entraînent le matin, et ceux qui travaillent pendant la journée vont s'entraîner après le travail. D'un côté, c'est une manière d'être plus efficaces parce qu'on est moins nombreux aux entraînements, c'est plus spécifique.
Avec ce que vous êtes en train de vivre, on imagine que vous avez encore plus resserré vos liens ?
A.F. : Nous ne sommes pas un grand pays donc nous n'habitons pas loin les uns des autres. Nous avons grandi ensemble, nous avons joué les uns contre les autres dans nos clubs d'enfance, nous avons joué ensemble en équipe nationale et maintenant nous sommes tous ici. C'est formidable de se connaître si bien, avec les forces et faiblesses de chacun. C'est une vraie famille.
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La petite ville de Klaksvik

Crédit: Getty Images

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