Liverpool - Virgil van Dijk va-t-il retrouver son niveau un jour ? Le doute devient durable

Ah les Pays-Bas, ses moulins, ses vélos, son gouda et… ses anciennes gloires aux phrases assassines. C'est une tradition qui ne se renie pas, années après années : en Hollande, les stars d'hier sont les vipères d'aujourd'hui. Virgil van Dijk l'a encore expérimenté ces dernières semaines, à la faveur d'un rassemblement international compliqué, symbolisé par cette défaite sèche face aux Bleus (4-0).

La double lame fut violente, au micro de Viggo Sport. Marco van Basten, d'abord : "Van Dijk fait du bruit, mais il ne dit rien du tout. Il n’est pas clair. Un bon capitaine pense à voix haute et dit clairement ce qui se passe. Lui reste entre les deux. Il crée le chaos". Ruud Gullit, ensuite : "En Angleterre, ils l’ont déjà critiqué. Il est arrogant. Il a été sélectionné pour l’équipe mondiale de l’année et il pense qu’il est meilleur que les autres". Rhabillé pour l'hiver.

Fidèle à sa ligne de conduite, van Dijk n'a pas voulu répondre à ses détracteurs, souvent sur son dos. "Je ne vois pas l'intérêt, a-t-il glissé en zone mixte après la victoire face à Gibraltar (3-0). Aujourd'hui, tout le monde a le droit d'avoir son avis". La suite de sa réponse, toute en interrogations, révèle cependant un peu plus le questionnement qui agite le Néerlandais : "Est-ce que j'ai fixé la barre trop haut, presque de manière irréaliste ?". C'est toute la question, en effet.

Où est passé le défenseur qui terrifiait l'Europe, celui qui visait, à juste titre, le Ballon d'Or en 2019 ? Il a sans doute disparu, en partie, à Goodison Park en cet après-midi d'octobre 2020 où la sortie kamikaze de Jordan Pickford fut à l'origine d'une rupture des ligaments croisés de son genou droit. Cette grave blessure, personne n'en sort vraiment indemne, pas même un roc physique comme van Dijk.

Le Néerlandais est revenu, bien sûr. Il a parfois été impérial, même, à l'image de cette campagne de Ligue des champions de l'an passé. Il a aussi été inquiétant, pas aidé par une animation défensive catastrophique cette saison, et coupable de moments de flottement si éloignés de sa splendeur implacable passée.

En cette saison, deux moments furent révélateurs de ce que van Dijk est devenu : un défenseur capable de très hauts et de très bas. C'est ce dernier rempart complètement passif, main dans le dos et immobile, face à Jadon Sancho, au point de se faire littéralement embrouiller par James Milner (2-1). C'est aussi celui qui parvient à mettre sous silence un Erling Haaland pourtant intenable lors de la manche aller (1-0) d'un duel qui pourrait ne pas avoir lieu ce samedi (13h30), le Norvégien étant incertain.

Cette régularité qui le fuit, c'est tout ce que recherche à nouveau van Dijk. "Je n'ai jamais été parfait mais bien plus constant et costaud, avouait-il encore avec sa sélection. On a eu beaucoup de succès avec l'équipe. Mais les joueurs de football, et van Basten et Gullit le savent mieux que personne, ont des hauts et des bas. C'est presque normal de ne pas pouvoir être toujours régulier. Il y a toujours des moments où, en tant que joueur ou en tant qu'équipe, vous cherchez votre meilleur niveau. Les gens ne devraient pas oublier ça".

Des circonstances d'autant plus atténuantes pour lui tant van Dijk n'a jamais rechigné à retourner au combat après sa grave blessure. Selon les calculs de The Athletic, le Néerlandais était même le joueur ayant disputé le plus de minutes dans le Top 5 européen avant d'arriver au Qatar. Pas un hasard que son corps l'ait à nouveau lâché dès le 2 janvier.

Cette sur-sollicitation participe sans doute à cette impression visuelle d'un van Dijk moins jaillissant, presque moins arrogant. Au temps de sa splendeur, il n'était pas rare de le voir lâcher du lest à l'attaquant qu'il devait surveiller, pour mieux le rattraper après coup et instaurer une forme de domination implicite. Sa marge s'est réduite, son jeu en a pâtit.

"Tout le monde attend que Virgil soit toujours là et bon, comme un robot, l'avait ainsi défendu Jürgen Klopp en février dernier. Il a joué tous les matchs l'an passé, il a joué toute la Coupe du Monde... ll est revenu jouer pour nous, puis s'est blessé et a rejoué encore, c'est ça la situation. Ce n'est pas parfait mais c'est ce que nous devons traverser. Je ne dis pas que tout est mauvais comme tout le monde le dit, c'est faux. Mais la plupart des choses ne vont pas bien, c'est comme ça. Mais nous savons qu'il faut s'améliorer, qu'il faut changer des choses. Cet été, nous évoluerons mais maintenant il faut avancer et nous battre".

Au plus fort de la tempête, Klopp n'a jamais dévié : son Liverpool est plus fort avec que sans van Dijk. De loin : 68,9% de victoires avec lui, 55,6% sans lui, mi-février. Interrogé par nos soins, Ibrahima Konaté refusait de refaire descendre van Dijk dans l'arène des défenseurs actuels et de la hiérarchie de ceux-ci. "Van Dijk, je le mets sur une autre planète", souriait-il. Même si, ces derniers temps, il est parfois apparu comme un simple mortel.