Liverpool - Manchester City : A City l’argent, à Liverpool le coeur : Trent Alexander-Arnold a-t-il raison ?

La voici de retour. La rivalité au sommet entre Liverpool et Manchester City, qu’un minuscule petit point sépare à la veille de la 28e journée, va une nouvelle fois rythmer la fin de saison en Premier League. Trent Alexander-Arnold sait très bien que le combat sera rude pour battre l’ogre citizen. "C’est difficile. Vous faites face à une machine construite pour gagner – c’est la manière la plus simple de décrire Manchester City et son organisation."

L’Anglais n’est pas passé par quatre chemins pour décrire le rival de Liverpool cette semaine, avant le choc au sommet de ce dimanche (16h45). "Même s’ils ont gagné plus de titres que nous et qu’ils ont probablement connu plus de succès, nos trophées signifieront plus pour nous et nos supporters en raison de la situation financière des deux clubs, a-t-il lâché à FourFourTwo. La manière dont chacun a construit son équipe a sûrement plus de valeur pour nos fans."

A City l’argent à ne plus savoir comment le dépenser ; à Liverpool la foi, le cœur et la résilience pour atteindre les sommets. Ce refrain accompagne les fans des Reds, et donc leurs joueurs, depuis l’émergence des Citizens au plus haut niveau. En un sens, il y a de quoi. Si l’on combine les données du CIES et de Transfermarkt, le club mancunien a dépensé plus de 2 milliards d’euros sur le marché des transferts depuis l’été 2013.

Au fil des mercatos, plus personne n’ose se frotter à l’ogre citizen, dès lors qu’il jette son dévolu sur un joueur : les très désirés Erling Haaland, Josko Gvardiol ou Jack Grealish sont tous arrivés sans que personne ne puisse rien y faire. La puissance financière de City est telle que tout lui semble permis. D’ailleurs, City se permet tout. La Premier League l’accuse de 115 infractions au fair-play financier en tous genres entre 2009 et 2018, sans que le club soit véritablement inquiété jusqu’ici.

Une question reste à poser au latéral droit de Liverpool. Pourquoi Chelsea, qui selon les sources citées plus haut a dilapidé près de 800 millions d’euros de plus que Manchester City depuis 2013 lors des mercatos, ne joue pas dans la même cour ? Précisément parce que Manchester City, en parfait contre-exemple du club londonien, a construit intelligemment sa trajectoire vers les sommets.

En recrutant un excellent coach, Pep Guardiola, qui en effet a été séduit par les grandeurs que lui promettaient les Emiratis. En recrutant Kevin De Bruyne, Ruben Dias, Rodri, Bernardo Silva, les hommes parfaits pour construire le projet de jeu grâce auquel le club domine l’Angleterre depuis plusieurs années, et l’Europe depuis l’an passé.

En cela, City n’a pas grand-chose de différent avec Liverpool. Les Reds aussi ont parfaitement manoeuvré, en attirant en 2015 Jürgen Klopp, qui allait désavouer la mode du football de possession pour enlever une Ligue des champions en 2018-2019, et un titre de Premier League en 2019-2020. Salah, Van Dijk, Mané, Robertson, Alisson, le club de la Mersey retiendra lui aussi les héros de son époque.

Soyons tout de même sérieux : les 1392 millions d’euros dépensés sur le mercato depuis 2013 par Fenway Sports Group, propriétaire de Liverpool, en font-ils vraiment un petit club où la passion est seul carburant, loin des machines à gagner dominant l’Europe grâce à leurs fonds intarissables ? Quand Virgil Van Dijk arrivait chez les Reds contre près de 85 millions d’euros en janvier 2018, fort de son statut de plus cher défenseur du monde, qui souscrivait encore à un tel narratif ?

Quant aux titres devenus supposément inodores et incolores pour les supporters de City, demandons à ceux présents à l’Etihad Stadium le 22 mai 2022, lors de la victoire 3-2 face à Aston Villa à la 38e journée, si ce nouveau titre de champion d’Angleterre obtenu le soir même les a laissés indifférents. Il ne faut pas s’y tromper : Manchester City a mérité tous ses titres. L’idée que le bonheur se dilue dans l’avalanche de trophées n’a d’ailleurs pas semblé affecter Erling Haaland, un brin moqueur à l’encontre d’Alexander-Arnold. "Je suis ici depuis un an et j'ai gagné le triplé, c'était un sentiment agréable", a déclaré l'attaquant norvégien, invité par Sky Sports à commenter ses propos. "Je ne pense pas qu'il connaisse ce sentiment, alors que c'est ce que j'ai ressenti la saison dernière et c'était très agréable".

Finalement, le récit de l’ogre citizen auquel le poucet liverpuldien tient tête ne prend jamais autant de sens ailleurs que sur la pelouse. Le City de Guardiola a toujours voulu le ballon pour marcher sur son adversaire, quand le Liverpool de Klopp a consenti à savoir lui laisser pour mieux lui reprendre. Une stratégie qui a fait des Reds le meilleur rival des Skyblues, ces dernières années. Pour cet ultime choc au zénith avant le départ de Jürgen Klopp, qui marquera pour sûr la fin d’une époque à Liverpool, c’est de cette histoire-là qu’il faut se réjouir.