Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

US Open 2021 - De l'euphorie Rogers aux huées pour Tsitsipas "La plus grande star de cet US Open, c’est le public"

Cyril Morin

Mis à jour 07/09/2021 à 13:42 GMT+2

US OPEN – Ah Flushing ! Si le circuit a retrouvé l’habitude de jouer face à du public après les huis-clos imposés par le Covid, tous les joueurs présents à New York ont pu constater que le Majeur américain restait dans une catégorie à part. Ici, on encourage, on électrise, on invective mais surtout on joue un rôle capital dans le déroulé des matches. Pour le plus grand plaisir de tous, ou presque.

La folie sur le court Arthur-Ashe après la victoire de Shelby Rogers sur Ashleigh Barty

Crédit: Getty Images

Un moment parmi tellement d’autres. Dimanche 5 septembre, 3e tour du tableau féminin, l’Américaine Shelby Rogers défie la numéro un mondiale Ashleigh Barty. Menée 5-2 dans le set décisif, Rogers s’accroche à chaque point pour refaire son retard. Nous voilà à 5-4, 30-A ; l’Australienne sert et tente une montée au filet. La réplique : une "moon ball", presque un faux lob, qui accroche la ligne. La suite ? Une éruption de joie incontrôlée du court Arthur-Ashe et un momentum qui change instantanément. L’Américaine débreake et finit par emporter la mise dans un tie-break électrique où le public, acquis à la cause de sa championne, aura un rôle au moins aussi important que les joueuses elles-mêmes.
"J’ai comme l’impression que c’est vous qui avez choisi celle que vous vouliez voir gagner, expliquera Rogers dans la foulée, en s’adressant à la foule en délire. Donc merci de m’avoir choisie ce soir. Les gars, c’est vous qui contrôlez ce tournoi". Ce soir-là, la nationalité de Rogers a évidemment compté dans ce soutien sans faille. Mais c’est aussi son statut dans ce match, outsider au pied du mur dans une manche décisive, qui aura décidé les spectateurs du soir à se mettre derrière elle.
"Honnêtement, les fans sont probablement la raison pour laquelle j’ai gagné ce soir, expliquait-elle après coup en conférence de presse. Ma tactique était bonne, certes, mais ils m’ont donné ce petit quelque chose que je n’aurais probablement pas pu apporter moi-même. […] Je leur suis reconnaissante de ne pas avoir pu entendre ma respiration aussi fort que l’année dernière dans un stade vide. Mon Dieu, que c’était incroyable. J’ai eu des frissons sur le court".
picture

Un match en montagnes russes, pour un succès dingo : comment Rogers a renversé Barty

"Rollercoaster" d’émotions

Elle n’est pas la seule. Dans toutes les bouches, le refrain est similaire : jouer à Flushing, face au public américain, n’a rien de comparable. Ici, la foule est un acteur à part entière du spectacle. Qui sait quand Daniil Medvedev aurait définitivement changé de dimension s’il n’y avait pas eu ce doigt d’honneur de 2019 ? Ou, à l’inverse, qui sait quel aurait été le scénario de l’incroyable cinquième set final entre Dominic Thiem et Alexander Zverev en 2020 devant un public en furie ?
Ici, on façonne des destins, des réputations. Ici, on joue le rôle d’accélérateur de particules, comme l’atteste l’acte de naissance de Carlos Alcaraz qui n’a cessé de rappeler l’importance de la foule dans ses exploits récents. Ici, on fait ressortir le meilleur (ou le pire) des joueurs. Ici, c’est un ascenseur émotionnel, un "rollercoaster" affectif, dont personne ne sort indemne.
picture

Comment Alcaraz a fait exploser le public du Ashe avec un monstrueux passing de coup droit

"J’ai l’impression que quand je joue ici, c’est plus qu’un simple match de tennis, un simple match gagné ou perdu, détaillait notamment Frances Tiafoe malgré son échec en 8e de finale. Franchement, ça me bouleverse complètement, j’ai presque pleuré en sortant du court. Pas seulement parce que j’avais perdu mais surtout pour la vague de soutien, d’amour que j’ai reçue. Perdre un match est franchement dérisoire face à ce qu’on peut recevoir […] Dans le troisième set, alors que je fais rebondir ma balle avant de servir, j’entends quatre gamins qui me disent 'quoiqu’il arrive, tu es mon inspiration.' C’est quoi ce délire ?".
Flushing, c’est ça : un joyeux bordel où tout le monde s’exprime à voix haute, où certains se déplacent même pendant les points et où les effluves de graillon se mêlent à la chaleur de la foule. Mais quand les gladiateurs parviennent à capter l’attention de l’auditoire, surtout sur le court Arthur-Ashe, le plus grand du monde, alors c’est un raz-de-marée qui emporte tout sur son passage et qui n’a aucune équivalence sur le circuit.
Même Novak Djokovic, qui en a pourtant vu d’autres, reconnaissait mardi une ambiance "phénoménale" et avouait un certain soulagement à retrouver ce genre d’émotions après presque un an et demi sous cloche. "On est franchement privilégié d’avoir cette attention et ce soutien. […] Je pense que les gens ont manqué d’action, de divertissement en étant sous contrainte pendant plus d’un an". Alors, forcément, les retrouvailles sont bruyantes, chaleureuses, tapageuses et parfois électriques. Et c’est finalement le niveau de jeu qui s’en ressent.
picture

Djokovic se plaint à l'arbitre du comportement d'un spectateur

Grand Chelem d’exception : et si c’était le public ?

Depuis quelques jours, c’est une discussion de passionnés qui s’est ouverte : où situer cet US Open complètement fou dans la hiérarchie des Majeurs récents ? "Je pense que c’est pour l’instant le meilleur tournoi du Grand Chelem dont je me souviens depuis de très nombreuses années", a d'ailleurs estimé notre consultant Alex Corretja dimanche. Des combats homériques en cinq sets, des révélations dans tous les sens et un niveau technique franchement incroyable : oui, cette édition est cinq étoiles.
Si Tiafoe estimait que ce niveau de jeu ahurissant était dû à l’absence du duo Federer-Nadal, d’autres ont instantanément redonné sa place légitime aux fans dans le débat. "Pour moi, c’est surtout que les fans sont de retour, a estimé un Medvedev au fait de l’effet Flushing. Dans presque tous les matches, s’il y a deux sets à zéro, les fans deviennent fous pour celui qui perd car ils veulent prolonger le match. On n’a plus connu cette sensation depuis longtemps, donc c’est vraiment plus compliqué pour celui qui gagne car il n’a plus l’habitude et ça devient plus facile pour celui qui perd car il se nourrit de ça pour tout donner".
Une version confortée par notre consultant Mats Wilander, qui connaît son Flushing sur le bout des doigts. "La foule a donné à tout le monde une décharge électrique, nous expliquait-il lundi. Il y a de l’adrénaline qui flotte dans l’air, bien plus que d’habitude, et les spectateurs sont survoltés à l’idée de voir n’importe qui jouer et donne beaucoup de voix. Avec ce stade plein, les joueurs et le public se nourrissent entre eux". Finalement, c’est peut-être Patrick Mouratoglou, pourtant proche d’un Stefanos Tsitsipas qui a connu le revers de la médaile, avec ces huées engendrées par ses "toilet breaks", qui a le mieux résumé la situation : "La plus grande star de cet US Open, c’est le public". Et personne ne s’en plaint.
Le public de l'immense court Arthur-Ashe avant le combat Zverev-Sinner
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Sur le même sujet
Partager cet article
Publicité
Publicité