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Interview Jean-Marc Furlan (Auxerre) : "Mon kiff, c'est de marquer un but de plus que l'adversaire"

Clément Lemaître

Mis à jour 11/09/2022 à 19:57 GMT+2

LIGUE 1 - Depuis ses débuts en tant qu'entraîneur professionnel il y a 18 ans, Jean-Marc Furlan est resté fidèle à sa ligne de conduite en prônant un jeu porté vers l'offensive. Avant Rennes-Auxerre ce dimanche, le technicien bourguignon de 64 ans a décrypté, pour Eurosport, sa méthode qui allie "plaisir", "émotions" et "audace". Une philosophie qui attire désormais de nouveaux adeptes en L1.

Jean-Marc Furlan, l'ex-entraîneur de l'AJA, lors du match Auxerre-Marseille.

Crédit: Imago

Jean-Marc Furlan, quelle était votre conception du jeu lorsque vous étiez joueur (de 1976 à 1993, à Montpellier, Bordeaux, Lyon ou Tours) ?
Jean-Marc Furlan. : "J'étais défenseur et j'étais vraiment un serial killer. A l'époque, le stoppeur était celui qui démontait l'avant-centre en permanence. Aujourd'hui, mon style de jeu surprend beaucoup de joueurs qui ont évolué avec moi. Ils me disent : 'Putain, quand je vois le football que tu fais pratiquer aujourd'hui comparé à ce que tu faisais quand tu étais joueur...'. Pourtant à l'époque, je rêvais de l'Ajax Amsterdam avec Johan Cruyff, Johnny Rep, Johan Neeskens et compagnie. Ensuite, par rapport à la philosophie du football français de l'époque, je n'avais pas très envie de devenir entraîneur professionnel au départ mais c'est Aimé Jacquet qui m'a poussé à passer mes diplômes. A ce moment-là, lui était DTN et moi j'entraînais à Libourne (ex-N2)."
Vous entraînez en professionnel depuis 2004 et vous avez conservé aujourd'hui votre philosophie de jeu portée vers l'offensive. Comment l'expliquez-vous ?
J-M.F. : "Au départ, je n'avais pas forcément envie de venir chez les professionnels car c'était un tel combat et l'aspect défensif était tellement important. Je me disais que ça allait être compliqué d'arriver avec mes idées de jeu en professionnel. Moi, ce que j'aime par-dessus tout, c'est le football offensif, avoir la possession du ballon et donner à mes joueurs des protocoles de jeu, même dans les 30 derniers mètres. Ça arrive souvent que des entraîneurs changent de vision en fonction des résultats. Dans ce domaine, je n'ai jamais, jamais, jamais changé. Moi mon kiff, c'est de marquer un but de plus que l'adversaire. Mais après attention, ça ne m'empêche pas non plus d'avoir envie de bien défendre."
Quand vous entraîniez Troyes, vous avez subi deux relégations en 2007 et 2013. Ces deux descentes vous ont-elles poussé à changer des choses dans votre vision du football ?
J-M.F. : "Jamais. Même quand on jouait le bas de tableau de Ligue 1 à Troyes, on remplissait le stade. Ça, c'est kiffant. Quand je suis arrivé à Auxerre (ndlr : à l'été 2019), il y avait 3 500 ou 4 000 personnes qui nous engueulaient et nous secouaient grave. Depuis neuf mois, le stade est plein. Avoir une identité, c'est très important pour faire adhérer le public. Même si tu es dans le dur, mais que tu as une identité, les spectateurs vont venir."
En mai dernier, Benjamin Nivet nous confiait que vos maîtres mots auprès des joueurs étaient "plaisir" et "émotions"...
J-M.F. : "Sur les deux derniers mois en L2, je me souviens avoir dit à mes joueurs : 'comment on s'éclate ?', 'comment on s'amuse ?', 'comment on a de l'audace ?'. Ce sont aussi des discours que j'ai tenus en ce début de saison contre Lyon (1-2) et Marseille (0-2) notamment. On montre qui on est par notre football. Si tu arrives à transformer tes joueurs sur le côté plaisir et audace, alors tu vas les rendre plus heureux. Et ainsi, ils vont se transcender sur le terrain et faire preuve d'une solidarité exceptionnelle. Je suis très proche de mes joueurs même si ça ne m'empêche pas d'avoir parfois des entretiens individuels avec eux. Je peux parfois être un peu plus dur, mais on est en tête-à-tête dans le bureau. Les jeunes acceptent beaucoup mieux ça plutôt que d'avoir un entraîneur qui t'insulte devant tout le monde, ce qui était plus courant à l'époque où j'étais joueur."
L'an dernier, j'adorais regarder jouer Rennes. J'aimais leur intelligence dans le jeu collectif
Dans les années 2000, vous étiez l'un des seuls entraîneurs à prôner un football offensif en France. Est-ce une satisfaction de voir une nouvelle génération arriver aujourd'hui avec des idées plus proches des vôtres ?
J-M.F. : "Ah oui. Si tu es audacieux sur le terrain et que tu prends plus de risques, alors tu offres du spectacle, les matches sont ouverts. C'est beaucoup plus agréable. Beaucoup de gens regardent la Premier League car tu as beaucoup d'audace et de prise de risques. La, le public s'éclate."
Entre Pascal Gastien (Clermont), Bruno Génésio (Rennes), Franck Haise (Lens) ou Régis Le Bris (Lorient), de quel entraîneur vous sentez-vous le plus proche au niveau des idées de jeu ?
J-M.F. : "Bruno Génésio, je le connais très peu même si je l'ai eu parfois au téléphone. Par contre, je connais plus Pascal Gastien. Il y a deux ans en L2, on avait fait un très, très gros match à Clermont. On avait perdu (0-1) mais la rencontre avait été très spectaculaire. Je suis admiratif de Pascal Gastien car Clermont n'a pas un très gros budget. Mais aussi l'an dernier, j'adorais regarder jouer Rennes à la télévision. Ils avaient plein de joueurs qui se connaissaient trop bien sur le terrain. Sur les passes par exemple, ils savaient parfaitement où se positionner. J'adorais l'anticipation des joueurs. Ils avaient un temps d'avance parce qu'ils se connaissaient parfaitement. J'aimais leur intelligence dans le jeu collectif. Après, si tu veux bien réussir, ça ne dépend pas uniquement du coach mais du système que tu mets en place au sein du club. A Rennes, on sent que tout le monde tire dans le même sens."
A l'étranger quel entraîneur vous inspire le plus actuellement ?
J-M.F. : "Une fois à Brest, j'avais invité mes joueurs au restaurant après une victoire. Ils étaient tous arrivés avec un masque de Pep Guardiola. Souvent, je cite Pep Guardiola, Jürgen Klopp, Marcelo Bielsa. J'adore ces entraîneurs et je me suis souvent inspiré de leurs entraînements. Je me suis aussi beaucoup inspiré de Christian Gourcuff ou Mircea Lucescu. Il faut se rendre compte qu'il a 77 ans et entraîne toujours au Dynamo Kiev. D'ailleurs, mes jeux à l'entraînement ont des noms d'entraîneurs : Mircea Lucescu, Christian Gourcuff, etc... Je fais ça depuis vingt ans. L'autre jour, d'ailleurs j'avais envoyé une photo d'un exercice à Christian. Quand j'ai fait mon stage, avant de passer mes diplômes, je suis allé à Donetsk en 2003. Yann Lachuer y est allé également trois ou quatre ans plus tard et Mircea Lucescu entraînait le Shakhtar à ce moment-là. Il avait été merveilleux et l'avait invité chez lui. Il lui avait filé tous ses entraînements et je lui ai tout piqué (rires)."
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