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En jaune, Emilien Jacquelin ne vise pas (encore) le Gros Globe : "Je ne vais pas me prendre la tête avec le général"

Simon Farvacque

Mis à jour 07/01/2022 à 10:29 GMT+1

COUPE DU MONDE - Emilien Jacquelin compte bien partir un jour à l'assaut du Gros Globe de cristal. Mais pas dès cette saison, axée sur les Jeux olympiques de Pékin (4-20 février 2022). C'est pourtant en leader du classement général qu'il s'élancera vendredi lors du sprint d'Oberhof, et ce malgré un début d'exercice perturbé par une blessure. L'Isérois nous raconte son cheminement vers les sommets.

Emilien Jacquelin, une saison sur fond de Gros Globe ?

Crédit: Eurosport

Un feu d’artifice avant les fêtes. Emilien Jacquelin s’est offert plusieurs "premières" en guise de cadeaux de Noël, le 19 décembre lors de la mass start du Grand-Bornand. Le double champion du monde en titre de la poursuite a aboli une anomalie, en décrochant sa première victoire individuelle sur le circuit, hors Mondiaux. "La plus forte, émotionnellement", nous a-t-il confié quelques jours plus tard. Un succès synonyme de prise de pouvoir : Jacquelin va découvrir la pression conférée par le dossard jaune, vendredi lors du sprint d’Oberhof.
La perspective d’endosser cette tunique de leader l’avait perturbé, la veille de son triomphe en France, lors de la poursuite (9e). Durant la "course des rois", il a retrouvé le feeling qui fait de lui un biathlète d’exception. "J’ai vraiment pu ressentir toute cette joie, cette fierté d’avoir fait une course à ma manière, avec mes qualités, mes défauts, énumère-t-il dans l’entretien qu’il nous a accordé le 23 décembre. J’avais à cœur de me reprendre après une poursuite où je suis passé à côté en faisant des choses qui ne me ressemblaient pas."
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"Je ne peux pas dire que je m'en moque"

Le voilà donc qui vire en tête, au sein d’un exercice 2021-2022 qu’il pensait d’autant plus polarisé par les Jeux olympiques que sa préparation a été chamboulée, en août, par une blessure sur chute, à l’avant-bras et au poignet sur le côté gauche. Être prêt pour Pékin (4-20 février) lui semblait envisageable. Faire preuve d’une telle régularité dès le premier mois de compétition, moins. Une agréable surprise qui ne remet pas tout en cause : "Le classement général, je n’ai jamais eu de souci à le dire : cela deviendra un objectif dans le futur. Aujourd’hui, je pense plus être encore en construction."
Ce qu’il a vécu en un week-end au Grand-Bo’, de la déception de sa poursuite tourmentée à la plénitude de sa mass start victorieuse, Jacquelin est habitué à y être confronté. Homme de courses d’un jour, il n’a de cesse d’osciller entre laisser parler son instinct et chercher à le canaliser pour en tirer le meilleur avec constance. Son défi quotidien ne change pas : "Si ça se passe bien sans forcément y penser, je ne vais pas me prendre la tête avec le général, y mettre plus d’énergie, y accorder plus d’importance." Il concède tout de même : "Être en tête du classement général, je ne peux pas dire que je m’en moque".
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Avec Fillon Maillet, "la guerre sur la piste" sans animosité

Jacquelin ne nie pas la portée symbolique de son nouveau statut, mais il relativise celui-ci : "On n’est même pas encore à mi-saison, il reste du temps pour faire de très bonnes choses… comme de très mauvaises." A ses yeux, "jouer un classement général", lui "demande(ra) d’évoluer" et il progresse en ce sens : "J’essaie de me développer, avec mes armes ainsi que mes points faibles. Je pense que je suis petit-à-petit en train de les gommer (...) J’ai essayé énormément de choses depuis le début de saison, (ce classement) montre bien qu’il y a eu une évolution."
Quant à la perspective de lutter avec Quentin Fillon Maillet, son compatriote et dauphin qu’il devance seulement de deux points, elle ne lui fait pas peur, humainement : "Cela ne peut que nous tirer vers le haut (…) Il n’y a pas d’animosité. Jusque-là, en tout cas, on est capable de se faire la guerre sur la piste et lorsque le soir on mange face-à-face, cela se passe très bien." Surtout que le duel franco-français pour le Gros Globe de cristal n’est pas encore d’actualité, comme il prend soin de le rappeler : "Il y aura tout le mois de mars pour penser au classement général et se tirer la bourre."

Jacquelin "plus puissant", Boe en retrait jusqu’à quand ?

Reste un constat : même pénalisé par la blessure qui a cristallisé ses craintes, Jacquelin domine. Sur la piste, c’est flagrant. "Je me sens plus fort que l’an dernier. J’arrive à mieux gérer mes efforts, à partir un petit peu moins vite. Je me sens plus puissant", se réjouit-il, satisfait d’avoir tiré profit de sa mésaventure. "La blessure a été une aide", ajoute-t-il ainsi. Contraint de mettre le tir en pause, le biathlète de 26 ans a progressé sur les skis : "J’ai pu axer le travail sur les jambes et je pense que ça porte ses fruits, en tout cas dans toutes les parties où cela grimpe."
Depuis le début de cet opus, soit neuf épreuves individuelles sur les vingt-deux au programme, Sebastian Samuelsson est le seul à rivaliser avec Jacquelin sur la vitesse de déplacement. Mais le Français se méfie de celui qui fait d’habitude office de référence dans l’exercice du fond - et même dans l’ensemble du biathlon : "Je pense que Johannes Boe n’est pas au top de sa forme. On sait que les Norvégiens vont jouer la carte à fond pour les Jeux olympiques."
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Le tir debout, celui de toutes les émotions

Face aux cibles, Jacquelin ne peut pas se targuer d'une telle mainmise. Son excellent 92% de réussite au couché s’accompagne d’un pénalisant 75% au debout. Le ton reste celui de la satisfaction, tant son gadin estival aurait pu avoir des conséquences plus néfastes : "Il y allait avoir des hauts et des bas en termes de tir, c’était indéniable. Pour l’instant, je suis content de voir avec quelle manière j’arrive à me relever et à travailler derrière la carabine."
Jacquelin analyse cela à travers le prisme de sa quête d’équilibre. "Au couché, je suis maintenant capable de mettre en place des tirs un peu plus posés comme des tirs rapides. Donc le challenge y est plus ou moins relevé", coche-t-il au rayon bons points, avant de détailler : "Un tir couché lance une course. Un tir debout, c’est là où les émotions peuvent entrer en compte et il faut savoir jouer avec (…) Je me pose encore pas mal de questions."
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"Je mettais beaucoup d’énergie dans cette position bis"

Pour en arriver là malgré son poignet gauche récalcitrant, Emilien Jacquelin a dû mettre en place une carabine (avec son frère, Clément) et une méthode de tir de substitution, au couché. C'est de l’histoire ancienne. "Je suis revenu à ma position habituelle, deux jours avant les courses du Grand-Bornand. C’était un risque, un petit peu osé… après, ça va avec la personne que je suis, sourit-il (…) En seulement deux jours d’entraînement, j’ai pu retrouver mon niveau, ma rapidité et mon assurance."
Jacquelin explique en quoi il lui paraissait doublement nécessaire de faire ce pas en arrière : "Je mettais beaucoup d’énergie mentale dans cette position bis (…) Au Grand-Bornand, j’ai pris entre 26 et 30 secondes (32, ndlr) à effectuer chaque tir couché. Avec cette position différente, c’était plutôt entre 35 et 39 secondes." Un gouffre dans son sport. Il cite sa sixième place lors du sprint de Hochfilzen pour l’illustrer.
Le 10 décembre dernier en Autriche, l’Isérois avait été crédité du 105e temps (sur 118 participants), lors de son premier tir, bouclé en 37 secondes. Quelques minutes plus tard, il échouait à 3 secondes du podium : "Je savais où elles étaient…" Pas de regret, cependant : "C’était la seule manière que j’avais, à l’époque, de pouvoir courir et être performant". Une époque révolue, puisque Jacquelin retrouve la pleine mesure de ses moyens. Seulement maintenant. Déjà devant.
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