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Polémique australienne, miracle allemand, exploit français : Le Top 100 de l'US Open (40-31)

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 08/09/2020 à 23:45 GMT+2

US OPEN - Suite de notre classement des matches les plus marquants de l'histoire de l'US Open dans l'ère Open chez les hommes. Parmi les dix matches de ce mardi, entre la 40e et la 31e place, un exploit et un presque-exploit français, un miracle allemand, du Sampras à gogo et une accusation de racisme.

Le Top 100 de l'US Open.

Crédit: Eurosport

Dossier réalisé par Laurent Vergne, Maxime Battistella et Rémi Bourrières

40. Roger Federer - Gaël Monfils

Edition : 2014
Quart de finale
Vainqueur : Roger Federer (Suisse)
Adversaire : Gaël Monfils (France)
Score : 4-6, 3-6, 6-4, 7-5, 6-2
Avec Roland, Flushing Meadows est incontestablement la scène majeure où Gaël Monfils s’exprime le mieux. Avec son tennis spectaculaire, sa capacité à jouer avec le public qui adore ses pirouettes et autres figures de style ainsi que son appétence pour l’état d’esprit US, le Parisien s’est souvent épanoui à New York où il a joué trois quarts de finale (2010, 2014 et 2019) et une demi-finale (2016). Mais il lui aura toujours manqué (du moins jusqu’ici) un petit quelque chose pour que l’aventure prenne des allures d’épopée.
Ce petit quelque chose a pris tout son sens ce mercredi 4 septembre 2014 lors d’une night session endiablée : jamais auparavant il n’avait été aussi près de s’offrir un membre du "Big 3" en Grand Chelem. A sa sortie du court, La Monf’ ne peut cacher ses regrets. "Je vais persévérer, ça le fera un jour. J’étais bien dans mon match, j’étais bien dans ma tactique, dans mes coups. Ça ne passe pas à grand-chose." A rien du tout, même. Enfin si, un point. Un tout petit point. Mais le plus dur à gagner, le dernier. Celui qui transforme une remarquable performance en exploit.
Alors qu’il mène deux sets à un et 5-4 dans le quatrième set face à Roger Federer, le Parisien obtient deux balles de match consécutives à 15/40 sur le service adverse. Il se retourne vers son clan, souffle un grand coup, l’air de dire : "C'est le moment ou jamais." Sur la première, pas vraiment de regrets : après une belle première slicée, Federer vient mettre la pression d’une volée liftée de coup droit que Monfils ne parvient pas à contrôler en passing. Sur la seconde par contre, après un retour bloqué flottant assez long, le Frenchy, pas vraiment débordé, part sur l’arrière en coup droit, offrant une balle courte au Maestro qui s’empresse de conclure dans la foulée.
Ce soupçon de passivité lui aura peut-être coûté ce quart de finale jusqu’alors mené de main de maître, sans les "monfilseries", divertissantes mais coûteuses en énergie et en concentration, dont il est parfois coutumier. Sérieux, motivé, surpuissant par séquences en coup droit et souvent indébordable, Monfils aura surclassé un Federer mal dans ses baskets dans les deux premières manches, avant de résister superbement au retour de flamme de la légende suisse. Il aura longtemps fait longtemps trembler le Bâlois. Mais seulement trembler. Car après ce jeu, il s’effondre, commettant deux doubles fautes pour céder la quatrième manche. De nouveau en pleine confiance, le FedExpress ne regardera plus dans le rétroviseur dans la 5e. Les deux bras en l’air, le Suisse crie sa rage autant que son soulagement : il l’a échappé belle.

39. Ivan Lendl - Boris Becker

Edition : 1992
Huitième de finale
Vainqueur : Ivan Lendl (Etats-Unis)
Adversaire : Boris Becker (Allemagne)
Score : 6-7 (7-4), 6-2, 6-7 (7-4), 6-3, 6-4
Ivan Lendl a terminé sa carrière avec un bilan positif dans ses confrontations directes avec Boris Becker. D'une courte tête : 11-10. Mais en Grand Chelem, l'Allemand lui aura causé beaucoup de tracas. Lorsqu'il affronte "Boum Boum" en huitièmes de finale de cet US Open 1992, Lendl n'a jamais battu Becker dans un Majeur en cinq duels. Trois finales et deux demies. A 32 ans, il est clairement sur le déclin. Ses problèmes de dos ont commencé à lui pourrir la vie. Au printemps, il a même été sorti dès le 2e tour à Roland-Garros.
Mais à New York, Lendl, qui se sent américain à 100%, retrouve presque toujours des couleurs. Vainqueur de son vieux rival Connors au 2e tour, il va signer contre Becker la dernière très grande victoire de sa carrière dans un tournoi du Grand Chelem. Un match plein, épique, qu'il va renverser malgré la perte frustrante des première et troisième manches au tie-break.
Becker se rue au filet : 155 montées sur l'ensemble de la partie. Mais plus le temps passe, plus il y monte en chaussons. Comme un symbole, c'est sur un passing de coup droit que Lendl signe le break décisif dans le dernier set, et d'un autre, en revers, qu'il l'achève sur la balle de match. Avec cinq heures et une minute au compteur, ce match devient alors tout simplement le plus long depuis l'introduction du tie-break à l'US Open en 1970.
Une sacrée journée puisque, auparavant, Stefan Edberg avait déjà eu besoin de cinq sets pour battre Richard Krajicek (match évoqué ce lundi) tout comme Michael Chang face à Wayne Ferreira. Le match Lendl – Becker devait d'ailleurs initialement se tenir dans l'après-midi avant d'être transformé en rencontre de night session.
Pour Lendl, ce succès a quelque chose de savoureux. D'abord parce qu'il a été encouragé comme rarement par le public de Flushing, plus enclin à saluer son retour de flamme de trentenaire que sa domination passée. Surtout, il prouve qu'il existe encore : "J'étais certain d'avoir encore en moi ce type de match". Il en produira un autre, dès le tour suivant, contre Stefan Edberg.
Becker, lui, s'en va presque blasé. Bougon durant sa conférence de presse (on peut le comprendre, puisqu'elle a débuté à 1h05 du matin), il s'agace (et on le recomprend) quand un journaliste lui demande s'il est déçu, avant d'admettre : "Je crois que, là, tout de suite, je suis plus épuisé que déçu. J'ai tout donné. Vous aviez deux types sur le court qui se sont battus pendant cinq heures. L'un d'eux devait perdre. Aujourd'hui, c'est moi."

38. Lucas Pouille - Rafael Nadal

Edition : 2016
Huitième de finale
Vainqueur : Lucas Pouille (France)
Adversaire : Rafael Nadal (Espagne)
Score : 6-1, 2-6, 6-4, 3-6, 7-6(6)
Les yeux exorbités à la Djokovic et la langue tirée, Lucas Pouille est dans la quatrième dimension. Ou dans son monde. Pourtant, même s’il faut se pincer pour le croire, c’est bien la réalité. Le Nordiste vient de terrasser au tie-break du 5e set, après un combat de titans, de plus de 4 heures de jeu le plus grand des combattants que ce sport ait sans doute connu : Rafael Nadal. D’un dernier coup droit en décalage, son 59e point gagnant de la partie, il vient de terrasser la bête. Sa première (et sa seule jusqu’ici) victoire sur un membre du top 5 mondial.
Si les dieux du tennis existent, ils ont dû accorder une attention particulière au Français lors de cette édition de l’US Open. Car ce match épique face au "Taureau de Manacor" a bien failli ne pas avoir lieu. Dès le 2e tour, Pouille se retrouve en effet dos au mur face au Suisse Marco Chiudinelli, pourtant modeste 144e à l’ATP. Mené deux manches à rien, le Français se récupère in extremis en débreakant son adversaire qui servait pour le match dans le 3e set, avant de s’imposer en cinq sets. Lors de son match suivant, il fait la course derrière Roberto Bautista Agut pour l’emporter encore au finish.
Dans le même temps, Rafael Nadal, lui, impressionne : trois promenades en trois sets secs et seulement 20 jeux lâchés. Entre un Français déjà bien entamé physiquement et un monstre dans ce domaine-là, il ne devrait pas y avoir photo. Mais galvanisé par l’occasion et le court Arthur-Ashe, Pouille lâche tout. Prenant la balle au sommet du rebond, il asphyxie d’entrée son adversaire, s’adjugeant le premier set 6-1. Vexé, le Majorquin réplique dans la foulée et le chassé-croisé se poursuit jusqu’à un ultime acte inoubliable.
Plus frais et sur la lancée de son retour à deux manches partout, Nadal fait le break que l’on pense décisif, mais Pouille jette ses dernières forces dans la bataille pour revenir et offrir un tie-break sous tension aux spectateurs. Trois balles de match manquées à 6 points à 3 ne le font pas dévier de sa tactique offensive et la quatrième est la bonne. "Lucas est jeune, mais il a déjà tous les coups du tennis dans son répertoire. L'enjeu maintenant pour lui est de continuer à progresser", notera l’Espagnol avec à propos. Le regard sombre, Nadal boucle sa première saison sans quart de finale en Grand Chelem depius 2004, et son 8e Majeur consécutif sans titre depuis Roland-Garros 2014. Mais le temps des vaches maigres touche bientôt à sa fin.

37. Andre Agassi - Jimmy Connors

Edition : 1989
Quart de finale
Vainqueur : Andre Agassi (Etats-Unis)
Adversaire : Jimmy Connors (Etats-Unis)
Score : 6-1, 4-6, 0-6, 6-3, 6-4
Andre Agassi est un peu, a-t-on parfois entendu, la version modernisée de Jimmy Connors, capable de prendre la balle tout aussi tôt mais bien plus fort, et avec plus de spin. Malgré leurs 18 ans d'écart, les deux hommes ont réussi à s'affronter à deux reprises, les deux fois consécutivement en quart de finale de l'US Open.
En 1988, Andre a terrassé son aîné en trois sets. Mais en 1989, l'affaire est tout autre. Le Kid a perdu l'insouciance de sa jeunesse et commence à se poser quelques questions existentielles, qui se manifestent par un comportement pas toujours facile à décrypter et pas mal de tensions avec la presse américaine.
Pour ce nouveau rendez-vous face à Jimbo, éternel jeune homme de 37 ans qui semble chaque année profiter de son passage à New York pour effectuer une cure de jouvence, des rumeurs circulent sur le manque de respect dont le jeune effronté a fait preuve à l'égard de l'ancien. Certains auraient entendu Agassi dire à haute voix sa volonté de "se faire Connors en cinq sets."
Faut-il trouver là l'explication de son incompréhensible baisse de régime, après le gain du 1er set, pour se retrouver mené 2 sets à 1 ? La chose paraît improbable, même si, avec Agassi... Ce qui est sûr en tout cas, c'est que Dédé retrouve d'un coup ses esprits pour se détacher 5-1 au 5e set. Et que la folle remontée dans laquelle va se lancer à corps perdu le vieux Jimbo ne doit rien à personne, sinon à son exceptionnelle fureur de vivre et de faire chavirer les foules.
Porté par le public qui a pris fait et cause pour lui, Connors se rue au filet et commence à grignoter un jeu, puis deux... Et le voilà revenu à 5-4, 0-15, dans une ambiance de corrida, face à un adversaire qui ne joue vraiment plus les fier-à-bras au moment de servir pour le match.
Mais Agassi est un champion, lui aussi, et le prouve en maîtrisant ses nerfs pour battre finalement son adversaire après 3h17 d'une véritable épreuve du feu. Battre ou plutôt abattre, il faut au moins ça, décidément, pour sortir Connors à New York. " J'ai toujours été une bête sur le court. Et les spectateurs de New York eux aussi sont des bêtes. J'adore être enfermé dans la même cage qu'eux." Ce soir-là à Flushing, plus que jamais, la cage était folle.

36. Lleyton Hewitt - James Blake

Edition : 2001
2e tour
Vainqueur : Lleyton Hewitt (Australie)
Adversaire : James Blake (Etats-Unis)
Score : 6-4, 3-6, 2-6, 6-3, 6-0
Sur le strict plan tennistique, ce 2e tour entre Lleyton Hewitt et James Blake valait le détour. Mais sa présence ici, particulièrement sur de telles hauteurs, doit beaucoup à la gigantesque polémique née des propos de l'Australien, accusé de racisme par... à peu près la terre entière.
Ce vendredi 31 août 2001, le prodige d'Adélaïde est perturbé par le tennis-champagne de Blake, que personne ne connaissait trois semaines plus tôt. 120e mondial, il a obtenu une wild-card à Cincinnati, où il atteint les huitièmes de finale avant de s'incliner contre Patrick Rafter, non sans l'avoir enquiquiné. Après le match, le double vainqueur de l'US Open glisse au jeune Blake un mot qui va agir comme un déclic dans sa tête : "Maintenant, j'espère que tu as compris que tu pouvais battre des gars comme moi."
Inscrit dans le grand tableau à Flushing grâce à une nouvelle invitation, James Blake est décomplexé à l'heure d'affronter l'autre référence australienne du moment, Lleyton Hewitt. Il va même mener deux sets à un avant de s'effondrer physiquement. Déshydraté, il prend un "bagel" dans le manche décisive. Mais c'est donc un incident, au début du 3e acte, qui va sceller la place de ce match dans l'histoire du tournoi.
Au service, Lleyton Hewitt est sanctionné d'une deuxième faute de pied en quelques minutes. Rouge de colère comme son t-shirt, il se précipite vers l'arbitre, Andres Egli, et demande le renvoi du juge de ligne ayant fait cette double annonce. "Tu le sors du court, dégage-le du court !" hurle Hewitt, sans être entendu. Puis il lâche ces mots : "Regarde-le", dit-il en désignant le juge de ligne. Regarde-le", reprend-il en pointant cette fois du doigt son adversaire. "Et dis-moi si tu vois des similitudes." James Blake est noir. Le juge de ligne aussi.
A sa sortie du court, le match est loin d'être la principale préoccupation médiatique. Lors de sa conférence de presse, Hewitt doit répondre à 31 questions. 29 concernant l'incident. Accusé de racisme, l'Australien tente de se défendre : "Je viens d'un pays multiculturel, je ne suis en aucun cas raciste. C'était juste une discussion entre l'arbitre et moi et je ne crois pas avoir dit quoi que ce soit de raciste."
Pendant quatre jours, Hewitt est harcelé par les journalistes américains. Les journaux, les télés, ne parlent plus que de ça, y compris les grands réseaux nationaux qui, jusqu'ici, ne s'intéressaient guère à l'US Open. Richard Williams, le père de Venus et Serena, établit un parallèle entre les aborigènes australiens et les indiens d'Amérique, avec une conclusion sans appel : "Oui, l'Australie est un pays raciste." On ressort du placard le "bloody nigger" balancé en plein match à Hawaï, un quart de siècle plus tôt, par Nastase à Arthur Ashe. Ce dernier avait fait preuve d'une classe folle. James Blake ne sera pas moins intelligent :
"Toute ma vie, j'ai entendu des choses que je n'étais pas supposé entendre. Mais je n'ai jamais rencontré de sérieux problèmes de racisme sur le circuit, au contraire d'Arthur Ashe et de Malivai Washington. Avec Hewitt, nous nous sommes expliqués et je crois qu'il a été vraiment sincère dans ce qu'il m'a dit. Je préfère donc lui laisser le bénéfice du doute."
L'incident fera beaucoup du tort à Hewitt, que tout le monde détestait déjà ou presque. Il beugle du "come on" trente fois par set, y compris parfois sur les doubles fautes adverses. Même chez lui, il ne fait pas l'unanimité. Après avoir décrété que le public australien était "stupide", il a été désigné fin 2000 "le sportif le plus haï d'Australie".
Dans cet US Open 2001, vu le contexte et son jeune âge, il va en tout cas faire preuve d'une sacrée force de caractère : neuf jours plus tard, après avoir battu notamment Roddick en quarts puis Sampras en finale, il décrochera son premier titre du Grand Chelem. "Ça n'a pas été facile de gérer tout ça, avoue-t-il alors, d'autant que je continue de penser que je n'ai rien fait de mal." Droit dans ses bottes...

35. Boris Becker - Derrick Rostagno

Edition : 1989
2e tour
Vainqueur : Boris Becker (Allemagne)
Adversaire : Derrick Rostagno (Etats-Unis)
Score : 1-6, 6-7(4), 6-3, 7-6(6), 6-3
L'histoire tient parfois à une poignée de centimètres. Pour le meilleur ou pour le pire. Novak Djokovic pourrait vous en parler. Boris Becker aussi. L'été 1989 est celui de l'Allemand, vainqueur coup sur coup de son troisième Wimbledon et de son premier US Open. Mais son sacre à Flushing, après une finale de haute volée contre Lendl, aurait pu ne jamais exister. Aurait dû, même, serait-on tenté de dire, tant sa victoire au 2e tour contre Derrick Rostagno fut miraculeuse.
Derrick Rostagno. Un vrai personnage. Une tête bien faite, brun ténébreux et chevelure sous la nuque. Un look à jouer dans Alerte à Malibu pour ce Californien qui se surnommait lui-même "la tortue" et aimait écumer le circuit américain en mobil-home. Une tête bien faite, aussi. Après sa retraite à tout juste trente ans, il achèvera ses études à Stanford, une des plus prestigieuses universités américaines, pour devenir avocat.
Ce jour-là, sous le soleil du court Louis-Armstrong, Derrick Rostagno, chaud bouillant, joue le tennis de sa vie du haut de ses 23 ans. Il breake deux fois dans le premier set puis remporte le tie-break du deuxième. Dos au mur avec deux sets dans la vue, Becker se retrouve en grand danger.
Sa situation devient plus tendue encore quand dans le jeu décisif du 4e set, il doit faire face à deux balles d'élimination après 3h40 de jeu. L'Allemand sauve la première balle de match à 6-4. Sur la seconde, Rostagno s'empare du filet. Becker lâche un passing de coup droit croisé mais la volée qui s'annonce pour Rostagno n'a rien d'injouable. Sauf que la balle ricoche sur la bande du filet, surprenant l'Américain, qui ne peut remettre la balle.
Deux points plus tard, Becker a gagné le tie-break, le set et, bien évidemment, le match. Car Rostagno ne va pas s'en relever. "Je n'ai pas tout compris", soupire-t-il à sa sortie du court, alors que Becker ironise sur son miracle : "Je n'irais pas jusqu'à dire que j'étais certain de m'en sortir. J'étais presque foutu."
La drôle de carrière de Derrick Rostagno sera émaillé de victoires tonitruantes (à Wimbledon, il est même le seul joueur à avoir battu John McEnroe, Jimmy Connors et Pete Sampras) et de défaites improbables et indigérables comme celle-ci.

34. Guillermo Vilas - Jimmy Connors

Edition : 1977
Finale
Vainqueur : Guillermo Vilas (Argentine)
Adversaire : Jimmy Connors (Etats-Unis)
Score : 2-6, 6-3, 7-6, 6-0
Dans cet US Open 1977, ça flingue à tout va. Au sens propre d’abord, puisqu’aussi ahurissant que cela puisse paraître, un spectateur est blessé par balle sur le court central lors du match du 3e tour entre John McEnroe et Eddie Dibbs, victime d’un coup de feu apparemment tiré depuis un appartement voisin. Mais aussi au sens figuré, puisque la violence verbale, ou le "trash-talking" comme on dit aux Etats-Unis, attend des sommets entre les principaux protagonistes. "Si je n’étais pas sûr de gagner à Forest Hills, il y a longtemps que je serais rentré à Buenos Aires pour m’offrir un bon steak argentin", s’exclame ainsi Guillermo Vilas, pourtant pas connu pour fanfaronner.
L’Argentin a des raisons objectives d’afficher une telle confiance. Il en est à 35 succès et 6 tournois remportés d’affilée sur terre battue, série entamée à Roland-Garros où il a conquis son premier Majeur au printemps. Et ça tombe bien, c’est la surface sur laquelle se dispute l’US Open pour la troisième (et dernière) année. Pour maximiser ses chances de victoire, Vilas décide, comme à Paris, de rester dans sa bulle. "Je me suis tellement isolé que je n’ai quasiment pas parlé pendant le tournoi, même avec (Ion) Tiriac", avec lequel il s’entraînait à Westchester à l’abri des regards, s’est-il récemment remémoré.
En mission, il ne lâche que 16 jeux lors de ses cinq premiers matches (les quatre premiers tours se disputaient alors en deux manches gagnantes, NDLR), et aucun set avant la finale face à Jimmy Connors, tenant du titre au parcours également immaculé. Dans ce duel de gauchers, l’Américain, qui avait balayé Vilas en trois manches en demi-finale l’année précédente, a clairement l’avantage psychologique et s’adjuge rapidement le 1er set. Voyant le match lui échapper, l’Argentin décide alors de suivre enfin les conseils de son coach roumain en usant et abusant du slice pour casser le rythme et renverser peu à peu la vapeur.
Aussi physique que tactique, la partie tourne définitivement dans le 3e set, remporté au tie-break par Vilas après avoir été mené 4-1. Puis c’est un cavalier seul de l’Argentin. Mais il était dit que cette folle édition – également marquée par la participation controversée de la transsexuelle Renée Richards au tournoi féminin, ou encore par la polémique sur l’innovation technologique de la raquette dite "spaghetti" à double cordage – ne pouvait se terminer autrement que dans la confusion. Sur sa 4e balle de match, Vilas voit l’approche de Connors sortir et l’arbitre, hésitant, lui donne finalement raison.
Qu'à cela ne tienne, "Jimbo", qui n’était pas avare lui-même en coups tordus, n'a pas le temps de réclamer vérification que des supporters argentins déchaînés envahissent le court et portent leur favori en triomphe. Battu chez lui, Connors n’assistera même pas à la remise du trophée.

33. Pete Sampras - Andre Agassi

Edition : 1995
Finale
Vainqueur : Pete Sampras (Etats-Unis)
Adversaire : Andre Agassi (Etats-Unis)
Score : 6-4, 6-3, 4-6, 7-5
Sans doute le tournant d’une immense rivalité. Après 1990 et avant 2002, c’est la deuxième finale new-yorkaise entre Pete Sampras et Andre Agassi, leur 17e face-à-face. Chacun en a gagné huit. Agassi est tenant du titre, numéro 1 mondial et reste sur 26 victoires : il n’a rien laissé à ses adversaires lors de la tournée américaine, raflant quatre titres consécutifs à Washington, Montréal, Cincinnati et New Haven. Vainqueur de trois de leurs quatre derniers duels dont le dernier un peu plus d’un mois plus tôt à Montréal, il semble enfin avoir trouvé la clé face à Sampras. Il est prêt à reprendre la main.
Tout Flushing, mis en bouche par l'exceptionnelle finale dames entre Graf et Seles, attend le choc. "L'excitation médiatique était plus forte qu'elle ne l'avait jamais été et qu'elle ne le serait jamais entre nous deux", racontera le Californien dans son autobiographie. Mais si la tension est à son comble, l’affrontement n’atteint pas les sommets attendus. La faute à un vent tourbillonnant qui rend le contrôle de la balle difficile et provoque 73 fautes directes en tout (40 pour Sampras et 33 pour Agassi), mais aussi à un Agassi, pas réellement dans son assiette.
L’intéressé ne passe pas à côté de l’événement dans les mêmes proportions que cinq ans plus tôt, mais il ne parvient réellement à se hisser à la hauteur de cette finale que dans le troisième set. Pour le reste, c’est Sampras, et son tennis aussi précis qu’explosif, qui fait le spectacle (60 coups gagnants dont un 24e ace pour conclure les débats). Jusqu’au bout, il n’aura pas hésité à prendre des risques, même dans les conditions climatiques difficiles du jour. "Contre un gars avec une qualité de retour comme celle d’Andre, il faut que je touche les lignes, et c’est ce que j’ai fait aujourd’hui", estimera-t-il.
Un point résume ce match : la balle de premier set. Vingt-deux frappes de balle et un revers gagnant de Pistol Pete pour finir avant de chauffer le public. Sampras s'impose en quatre sets, malgré la pression mise par Agassi à mi-match. Le "Kid de Las Vegas" décrira sa défaite comme le moment "le plus dévastateur" de toute sa carrière. "Jamais je ne me suis senti aussi seul sur un court qu'à la fin de cette finale." Une frustration d’autant plus intense qu’il n’aura pas joué cette finale à 100 % de ses moyens, gêné par une blessure aux côtes et ainsi contraint à servir moins fort. Il mettra près de trois ans à s’en remettre, laissant les rênes du tennis mondial à un Sampras ultra-dominateur.

32. Ilie Nastase - Arthur Ashe

Edition : 1972
Finale
Vainqueur : Ilie Nastase (Roumanie)
Adversaire : Arthur Ashe (Etats-Unis)
Score : 3-6, 6-3, 6-7(1), 6-4, 6-3
Durant toute sa carrière, Ilie Nastase aura traîné la réputation - certes pas volée - du brigand attachant qui aurait pu dominer plus largement son époque s'il avait su davantage contenir les piles électriques qui lui servaient de nerfs.
Il faut pourtant lui reconnaître de faire preuve, lors de cette finale 1972, d'une force mentale magistrale pour venir à bout du héros local Arthur Ashe, après avoir été mené 2 sets à 1, 4-2 au 4e set, et pesté contre une somme de décisions arbitrales qu'il estimait (sciemment ?) favorables au joueur américain, vainqueur pour sa part en 1968.
C'est fort, tout de même, car le génial Roumain a jusqu'alors perdu ses deux premières finales en Grand Chelem : à Roland-Garros en 1971 contre Jan Kodes puis deux mois plus tôt à Wimbledon contre Stan Smith, cette dernière en ayant gâché une énorme occasion en fin de 5e set. On en connaît qui ont traîné une réputation de loser pour moins que ça.
Nastase y a donc coupé court en renversant une situation bien mal embarquée face à l'homme qui a donné son nom au central actuel de l'US Open (alors joué, rappelons-le, sur herbe et à Forest-Hills). On le voit pourtant au bord de la crise de nerfs lors du tie break du 3e set, qui a la particularité de se jouer au format dit de la "mort subite" : premier à 5 points, avec point décisif à 4-4. Autant dire que les mini-breaks sont chers.
Or, Nastase perd un point de service capital à 2-1 après deux s'être vu compter, à tort estime-t-il, deux premières balles fautes par le même juge de service, vers lequel il balance sa serviette et une balle au changement de côté (à 1-3), ce qui lui vaut les copieux sifflets du public.
Déconcentré, le Roumain laisse filer le tie break et quasiment le match puisqu'il doit aussi sauver une balle de 4-1, double break au 4e. Mais il calme son courroux à temps, fait taire les démons qui pleurent en lui et, à partir de là, devient intouchable. Il refait son retard puis survole la fin du match pour remporter, à 26 ans, son premier titre du Grand Chelem et les 25 000 dollars de prize-money qui vont avec. Docteur Ilie et Mister Nasty résumé en un match...

31. Pete Sampras - Ivan Lendl

Edition : 1990
Quart de finale
Vainqueur : Pete Sampras (Etats-Unis)
Adversaire : Ivan Lendl (Tchécoslovaquie)
Score : 6-4, 7-6, 3-6, 4-6, 6-2
Le premier coup d’éclat d’un futur géant. A 19 ans, Pete Sampras espère bien confirmer ses progrès de l’année sur la plus belle des scènes pour un Américain, Flushing Meadows. Lui qui a commencé la saison à une modeste 61e place mondiale se retrouve tête de série numéro 12 (grâce entre autres aux deux premiers titres de sa carrière à Philadelphie et à Manchester) de cet US Open où il s’était déjà fait remarquer l’année précédente en sortant Mats Wilander au 2e tour. S’il fait partie alors des grands espoirs du tennis américain, Michael Chang, vainqueur à Roland-Garros en 1989, et Andre Agassi, beaucoup plus précoces que lui, concentrent les attentes.
Quand il domine Thomas Muster (numéro 6 mondial) pour se qualifier pour son premier quart de finale en Grand Chelem, Sampras a d’ailleurs objectivement déjà réussi son tournoi. Mais son ambition n’a d’égale que son relâchement. Au pied de la montagne Ivan Lendl, 3 fois vainqueur et qui reste sur 8 finales consécutives à New York, qu’a-t-il à perdre ? Dans les deux premiers sets, tout se déroule comme dans un rêve pour lui : sa première balle fait mouche, ses approches sont percutantes et ses volées tranchantes.
L'ogre d’Ostrava en reste coi. Le joueur qu’il a en face de lui n’a pas grand-chose à voir avec l’adolescent qu’il avait coaché l’espace d’une semaine, un peu plus d’un an plus tôt, en marge du Masters. A l'époque, après l'avoir effrayé avec ses bergers allemands et rôti sur les courts d’entraînement, il lui avait donné quelques conseils pour devenir numéro 1 mondial. Force est de constater que Sampras a bien retenu la leçon. Mais à 19 ans, difficile de maintenir une telle intensité sur trois manches d’affilée, et le Californien ne peut éviter le retour de Lendl dans le match.
Celui que l’on ne surnomme pas encore "Pistol Pete" avait-il laissé passer sa chance ? Vraisemblablement, s’il avait affronté "Ivan le Terrible" à son apogée. Mais Lendl sort d’une double déception : blayé en demi-finale de Wimbledon par Edberg, il a dans la foulée perdu sa place de numéro 1 mondial début août au profit du même Edberg. Il ne le sait pas encore, mais c’est le début de la fin.
Jamais vraiment à l’aise dans ce quart de finale, il ne peut donc endiguer le retour de flamme de Sampras et s’incline même largement dans l’ultime acte. "C’est la plus grande victoire de ma carrière, rien ne surpasse ça. Je pense que si je peux tenir la pression de Lendl, je peux aussi le faire contre McEnroe", s’enthousiasme le jeune Américain. La suite lui donnera raison en demie, avant de s’adjuger le trophée face à un Andre Agassi fantomatique dans la bataille finale des jeunes loups.
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